samedi 28 décembre 2013

Le loup de Wall Street (The Wolf of Wall Street)





Réalisation : Martin Scorsese
Scénario : Terrence Winter
Durée : 3 heures
Distribution : Leonardo DiCaprio, Jonah Hill, Jean Dujardin...
Genre : Wall (S)trip

Synopsis : Ascension et chute de Jordan Belfort courtier à Wall Street qui vit dans la débauche et l’excès. Trop n'est jamais assez.


Comme chaque film de Martin Scorsese, Le loup de Wall Street est un événement attendu par beaucoup de passionnés de cinéma. Moi-même fan du cinéaste, j'étais impatient découvrir ce cadeau de Noël dans les salles, un peu comme il y a deux ans pour le féérique Hugo Cabret. Scorsese, toujours fin couturier de la mise en scène tisse une fresque remplie de savoir faire parfois insipide (donc assez décevante), malgré son côté juvénile et déjanté dans laquelle le cinéaste semble être un gamin de vingt ans à plus de soixante dix ans. Plutôt partagé donc.

Pour sa cinquième collaboration avec Dicaprio, le cinéaste offre à nouveau à ce dernier un rôle à Oscar. Si l'Oscar serait largement mérité pour la carrière époustouflante de l'acteur, Le loup de Wall Street ne s'avère pas être leur meilleure collaboration. J'ai l'impression que Scorsese voulait offrir à DiCaprio ce qu'il avait offert a De Niro vingt ans plus tôt avec Casino. En effet, beaucoup de séquences et de plans se ressemblent, de même que les thèmes, les personnages très machistes, très orduriers comme dans beaucoup des films de Scorsese. Si Casino dégageait un magnétisme inédit et inégalé, Le Loup de Wall Street n'obtient que quelques similitudes narratives et de mise en scène par moment.

Si Scorsese veut signer une fresque moins documentaire et plus légère que ses précédentes, il réussit quand même à rendre intéressante cette ordure sur pattes par son savoir-faire de grand cinéaste. La satyre du rêve américain fonctionne beaucoup mieux dans les deux dernières heures. Effectivement, le scénario est bien meilleur à partir de la scène de rupture avec sa première femme (formidable au passage). Toute la première heure est une longue introduction brouillonne et abondamment remplie de blagues salaces, composée de pics d'humour parfois drôles, parfois exaspérants. Si cela reste tout de même réussi dans le genre, le scénario en abuse beaucoup trop au point de totalement déséquilibrer la fresque. Le film aurait pu être coupé d'au moins une demie heure dans cette première heure, il en serait largement avantagé. Heureusement, quand les ennuis arrivent, la mise en scène et le script savent bien mieux négocier l'humour et le tragique. Scorsese fait ensuite un peu comme dans Aviator en appliquant sa mise en scène de cinéphile implacable et virtuose de manière assez automatique. Enfin, le côté comique marche à merveille et prend le dessus à la salacerie, aux trips abondants et répétitifs de ce loup drogué et donne un ton plus intelligent et efficace au film. La débauche filmée de manière moderne et ancienne à la fois marche plutôt bien, Scorsese fait le boulot même si c'est du déjà cousu main pour le cinéaste. Le film passe donc d'un Very Bad Trip et Projet X à un Scarface scorsesien.

Dans la dernière heure, Scorsese est toujours aussi clinquant et sa fresque de luxe suit toujours la même cadence. La narration déjà vue dans Les Affranchis et Casino, ponctuée de "fuck", nous confirme que nous nous trouvons bien dans un film de Scorsese (merci Terence Winter), malheureusement caricatural. La seule baisse de rythme se trouve à la toute fin, où on reconnaît encore le procès, l'humour et la dégringolade du système de Casino. Les fans de Casino reconnaîtrons sans problème que DiCaprio est souvent dans les même décors et les même plans que De Niro. Scorsese pousse le bouchon un peu plus loin en dépeignant cette pourriture comme une légende vivante, surtout dans la dernière scène, une des plus réussies du film. On retrouve un peu le final de Taxi Driver ou de La valse des pantins sauf que l'on n'a pas de confusion entre délire et réalité. Le Loup de Wall Street est le film le moins psychologique de Scorsese désormais, certainement son film le plus limpide et dans l'air du temps.

En une séquence du Loup de Wall Street, on retrouve trois fois plus de sexe que dans toute la filmographie du cinéaste, autant de "fuck" voir plus que dans Les Affranchis et Casino. On retrouve un patchwork de tous ses films, ponctué de ses références habituelles aux meilleurs du genre (Capra, Tarantino, Apatow ou même Ritchie). Un lâchage total tantôt jouissif, tantôt déconcertant, dont je pense que l'influence de DiCaprio à la production et la collaboration n'y est pas pour rien. Une chose est sûre, c'est que même si Dicaprio n'a pas le magnétisme qu'avait Robert De Niro, c'est clairement avec Scorsese qu'il obtient ses plus grands rôles.

On pourrait presque penser à un remake moderne des Affranchis et Casino. Même si dans les films maudits de Scorsese on reste toujours a des lieues de la leçon de cinéma de Casino, il se dégage malgré tout quelque chose de novateur, contrairement au Loup de Wall Street. Il reste cependant un cinéaste donnant à ses films un ton particulier, jamais prétentieux, contrairement à Tarantino ou même pour la première fois aux Coen cette année. Preuve qu'il restera toujours un des plus grands cinéastes en activité, en permanence dans la novation, dans le virtuose. Rien que la bande annonce (très illustrative du film au passage) le prouve. Dans la forme c'est bien du Scorsese, mais ce Wall Street sous amphétamines est un genre de Las Vegas Parano chez Ace Rostein dans Casino. Si le casting est une nouvelle fois terrible, mention spéciale à Jonah Hill (avec le dentier de Marty ?) absolument surprenant et monumental, sans oublier notre frenchie Jean Dujardin qui signe une des scènes les plus désopilantes du film.

Le Loup de Wall Street est un Scorsese mineur qui risque vite de se démoder. Il a tout du moins le mérite de nous offrir un cinéma qui a de la gueule, chose qui n'est pas donné à n'importe quel réalisateur. Il reste cependant avec Margin Call l'un des films les plus réussi sur Wall Street, plus intéressant et moins pataud que ceux d'Oliver Stone.

Note : 6,5/10

vendredi 20 décembre 2013

Snowpiercer : Le transperceneige (Snowpiercer)






Réalisation : Bong Joon-Ho
Scénario : Bong Joon-Ho et Kelly Masterson.
Durée : 2 h
Distribution : Chris Evans, Song Kang Ho, Ed Harris, John Hurt, Tinda Swinton...
Genre : Gangs of RER.

Synopsis :

2031. Une nouvelle ère glaciaire. Les derniers survivants ont pris place à bord du Snowpiercer, un train gigantesque condamné à tourner autour de la Terre sans jamais s'arrêter. Dans ce microcosme futuriste de métal fendant la glace, s'est recréée une hiérarchie des classes contre laquelle une poignée d'hommes entraînés par l'un d'entre eux tente de lutter. Car l'être humain ne changera jamais...

Après différents exercices de styles plus que brillants, le cinéaste Bong Joon-Ho confirme avec Snowpiercer qu'il est actuellement le réalisateur qui réussi le mieux à mélanger les genres avec tant de virtuosité. Si bien sûr d'autres cinéastes brillent également en la matière, Bong Joon-Ho possède les scripts les plus riches, denses, originaux et inventifs. Une nouvelle fois à l'écriture du scénario avec la collaboration de Kelly Masterson (7h58 ce samedi là), le cinéaste coréen de The Host nous offre un blockbuster d'auteur international qui fait mesure d'ovni dans une époque où le cinéma est trop souvent aride en originalité. Rien que pour cela, Snowpiercer est un film à ne pas rater.

Inspiré d'une bande dessinée éponyme, Snowpiercer se situe entre un Spartacus de Stanley Kubrick (lutte des classes) et un Soleil vert de Richard Fleischer (côté science fiction, anticipation) le tout dans une arche de Noé. Énormément de pistes et de thèmes passionnants sont abordés dans ce scénario. Ce dernier dépeint une critique virulente de la société en général, de sa violence, de ses vices, de sa politique et de l'espoir de ses différentes classes. Une peinture pessimiste de l'Homme et de son pouvoir, ses rapports de forces et sa hiérarchie, le tout magnifiquement dépeint avec un sens virtuose du détail, de façon très crédible. En plus d'être abondamment riche, le scénario est d'une extrême habileté rythmique et narrative, digne d'un grand classique du cinéma. La mise en place est très efficace, mais tellement rapide qu'elle pourrait décourager certains : le film plongeant le spectateur dès les premières minutes dans une violence qui pourrait lui faire penser à un énième vulgaire film de violence gratuite. La suite pourtant est une fabuleuse aventure onirique et cinématographique. La conquête progressive des wagons du train est un exercice de style virtuose où suspense, humour, action, émotion et satyre sont magistralement assemblés. Plusieurs visionnages s'annoncent indispensables pour capter et saisir plus de détails.

A la fois accessible, ambigu et très suggestif, Snowpiercer ne tombe jamais dans la facilité, le too much et encore moins la niaiserie. Tout est traité dans une grande pudeur, sincérité et élégance. Le cinéaste de Mother prend le temps de faire des pauses dans l'action et de donner encore plus d'ampleur à son scénario afin de rendre les différents tons à son film qui est un véritable éventail à émotions. Également très bien maîtrisé dans son rythme, on ne ressent aucune longueur grâce à une intrigue impalpable et remplie de rebondissements régalant (la scène du tunnel par exemple). Un peu comme le début du film, le final peut décevoir par la rapidité du dénouement, et le face à face succinct entre Winston et Curtis. S'il doit certainement exister une version un peu plus longue, pour ma part cette fin est juste magistrale et d'une cohérence parfaite. Le cinéaste n'en fait pas des tonnes et ne prend pas le public pour un idiot.

Côté interprétation, ma plus grande surprise est Chris Evans. Ce dernier compose ici une des plus grandes prestations d'acteurs de ces dernières années. Sans que le film ne lui offre un « rôle à oscar » il délivre une prestation à la fois grandiose et subtile où il est à la fois impérial, vulnérable et torturé dans le rôle du meneur aussi ambigu qu'attachant. Le choix d'Ed Harris a déjà été utilisé par d'autres cinéastes dans le domaine du machiavélisme (Peter Weir, David Cronenberg), et s'avère une nouvelle fois payant, en effet, il dégage un charisme époustouflant. Tilda Swinton marque les esprits dans son personnage aussi abominable moralement que physiquement. L'habitué au cinéaste et irrésistible Song Kang-Ho compose un numéro de fée clochette explosif aussi dopé que roublard. On appréciera également le grand acteur John Hurt en guise d'hommage dans le rôle de Gilliam. Le reste du casting est également aussi régalant que judicieux, dont même le trop souvent oublié Jamie Bell.

Bong Joon-Ho nous plonge dans un fabuleux huis clos, une épopée sociale qui oscille en permanence entre le thriller, le film d'aventures et d'anticipation. Réalisé avec une grande maestria, Bong Joon-Ho réussit une merveilleuse alliance de la culture du cinéma hollywoodien et du cinéma asiatique tout en conservant sa touche particulière. Le cinéaste est toujours aussi habile avec l'émotion, le thriller et la psychologie marquée de ses personnages. La mise en scène est sensible, juste et intelligente avec un fascinant sens de l'image et un travail sur l'espace surprenant. Ce huis clos est paradoxalement très aéré par sa narration (beaucoup d'événements) et oppressant (effet carcéral garanti). La bande originale, très belle, donne de l'ampleur et du relief, mais n'appuie jamais trop lourdement les actions comme on peut le voir trop souvent dans la plupart des films actuels. La violence est un sujet tabou comme chaque fois : ici elle est esthétique sans être particulièrement sublimée ni enlaidie. Le travail de l'image fait parfois penser à des vignettes de bande dessinée. Hormis les effets spéciaux (sur l'extérieur du train) qui vieilliront certainement assez vite, la photographie est particulièrement belle.

Après son court métrage réussi dans Tokyo, Bong Joon-Ho confirme son talent dans le huis clos. Si Le transperceneige est actuellement le film du cinéaste contenant le plus de violence physique, cette dernière n'est pas gratuite et ajoute une touche de crédibilité. Les cassures de rythmes, les contre-pieds narratifs peuvent dérouter les plus adeptes aux blockbusters classiques. A croire que le cinéaste s'est donné le défi de déformer toutes les ficelles du genre. Ce film est à l'image des autres films du cinéaste : un ovni passionnant. Il est certainement son film le plus risqué mais aussi son plus réussi, en tout cas du même gabarit que Memories of Murder et Mother.

Sans faire du Malick ou du grand film contemplatif, le cinéaste coréen démontre que le grand cinéma peut parfois se trouver dans les salles grand public. Un blockbuster habile et très intelligent (oui vous avez bien lu les mots « habile » et « intelligent » dans la même phrase que « blockbuster ») aussi bien dans le fond que dans la forme. Le cinéaste insuffle son grand talent de conteur et de metteur en scène dans un blockbuster dont il reforge avec brio toutes ses lettres de noblesses. Pour ma part, Le transperceneige est également actuellement le meilleur film sur le thème de la fin du Monde, surtout par son côté inventif. Cette conquête de cette arche de Noé des temps modernes est certainement un des plus grands exercices de style que j'ai eu l'occasion de voir au cinéma. Un tour de force impressionnant qui fait clairement de Bong Joon-Ho un des plus grands cinéastes contemporains.

Ce film figurerait pour ma part dans le top dix des meilleurs films des années 2000.

PS : Le montage américain a coupé la fameuse séquence de l'école. A voir comment ils se sont débrouillés...

Note : 10/10

La dévédéthèque parfaite dans le même thème :

Soleil vert de Richard Fleischer, Spartacus de Stanley Kubrick et La planète des singes de Franklin J Schaffner. 

jeudi 10 octobre 2013

Allah-Las





Je ne connaissais pas du tout le groupe Allah-Las avant de tomber sur un de leur morceau par hasard. Tell Me (What's on your Mind) m'a donc poussé à écouter dans la foulée leur unique album à ce jour qui porte le nom du groupe. 

Mon avis n'est pas très objectif puisque j'apprécie particulièrement la musique des années soixante, dont le groupe s"inspire très fortement. C'est d'avance un point qui me plaît. Allah-Las est un album cohérent avec de bons morceaux. Beaucoup de ces derniers me font penser à du Brian Jonestown Massacre mêlé avec des groupes sixties comme The Remains, The Turtles ou encore The Byrds. Un fameux mélange dont les mélodies sont très bien travaillées et ne laissent pas une impression de déjà entendu fade. Le groupe conserve le même ton du premier au dernier morceau et nous transporte rapidement dans leur atmosphère.

Extrêmement calme, avec beaucoup de charme et d'élégance, la musique reste convenue (trop peut-être) et se transforme vite en un album de détente, de plage, au sens positif du terme. C'est clair qu'on sent l'air de la Californie et de ses surfeurs. Ceux qui recherchent trop de nouveauté passeront vite leur chemin, les autres trouveront sans doute leur plaisir.




Pour l'amateur de musique que je suis, il me suffit de ce peu pour apprécier cet album simple, très propre et aux belles sonorités. Allah-Las est une parenthèse musicale rétro bien agréable à savourer et à découvrir. 



mardi 24 septembre 2013

Conjuring : Les dossiers Warren (The Conjuring)



Réalisation : James Wan
Scénario : Chad Hayes et Carey Hayes
Durée : 1 h 45
Distribution : Vera Farmiga, Patrick Wilson, Lili Taylor...
Genre : Montag(n)e de clichés

Synopsis : Conjuring : Les dossiers Warren, raconte l'histoire horrible, mais vraie, d'Ed et Lorraine Warren, enquêteurs paranormaux réputés dans le monde entier, venue en aide à une famille terrorisée par une présence inquiétante dans leur ferme isolée... Contraints d'affronter une créature démoniaque d'une force redoutable, les Warren se retrouvent face à l'affaire la plus terrifiante de leur carrière...


Connaissant James Wan uniquement pour son surestimé mais sympathique Saw, je suis allé voir avec tout de même une certaine appréhension son dernier film : Conjuring : Les dossiers Warren. J'avoue également que les notes dithyrambiques sur ce film de genre m'ont intrigué. Même dans les meilleures conditions (une séance privée) j'en retiens surtout un phénoménal empilement de clichés plus risibles que frissonnants.

On pourrait croire que le scénario est un défi lancé entre scénaristes : celui de mettre le plus de clichés possibles dans une revisite de Paranormal Activity. Sur ce point là, le défi est plus que rempli. Pour le reste, et notamment d'en faire un film terrifiant, c'est complètement raté. Tous les clichés sont tellement grossiers et traités de manière si banale et plate qu'on pense tout le long à une parodie de film d'horreur, sans humour bien évidemment. Sur un ton souvent ampoulé, le scénario n'a aucune once d'originalité et est totalement dépourvu de subtilité. Les thèmes de la maison hantée, mais aussi de l'exorcisme, sont mixés et utilisés de manière intensive. Ces derniers sont alignés de manière mathématique, anecdotique et sans inventivité. A la place de l'angoisse, le script est avant tout jalonné de séquences qui dégoulinent de bons sentiments, de niaiseries qui trouvent leur apogée dans un happy-end même plus imaginable de nos jours (= ringard).

A cause de son manque d'ambition, la mise en scène de James Wan ne rattrapera pas la médiocrité du scénario. Une illustration techniquement au point mais au final très plate et conventionnelle. Le cinéaste souffre d'une mécanique téléphonée, faussement millimétrée et formatée qui vire à la démonstration. Rien de ne se révèle habile, ni subtil dans la façon dont est sollicitée la peur hormis une accumulation facile de thèmes terrifiants. Seule la séquence dans la cave avec Lorraine Warren (Vera Famiga) reste efficace grâce à une sorcière physiquement horrible.
La musique est utilisée à tout va, parfois à outrance, soulignant sans cesse très grossièrement toutes les émotions, un peu comme dans une sitcom qui nous impose les moments où nous devons pleurer, rire, ou encore avoir peur. La bande son a beau être travaillée dans la première partie du film, tout sera vite gâché et oublié par le spectacle grand-guignolesque qui suit.
Niveau casting, les acteurs sont tous fades et lisses, aussi bien physiquement que dans leur jeu, ce qui fait également penser que nous sommes dans un téléfilm.

Conjuring : Les dossiers Warren est une sorte de musée de clichés des horreurs. C'est peut-être cette accumulation qui effraie tant de monde, mais cette succession est hélas traitée sans virtuosité et de manière plus anecdotique qu'intelligente. James Wan signe donc un téléfilm de luxe qui ne se compare absolument pas aux bons films du genre. Le plus effrayant dans tout cela reste clairement le succès public et critique de ce film. En constatant un encensement si grand pour un film du dimanche soir d'une facture si mièvre, on peut penser que le genre a urgemment besoin de voir de nouveaux talents. Une réaction tout de même assez paradoxale par rapport aux critiques de ces derniers temps que l'on entend sur les blockbusters hollywoodiens. Si les effets spéciaux ne sont pas autant de la partie, nous avons pourtant droit ici au même réchauffement, un plat complètement aseptisé et indigeste. Si vous êtes fan de maisons hantées, jetez plutôt un œil à la première saison d'American Horror Story, la série de Ryan Murphy qui possède au moins un scénario avec une intrigue ficelée.


Note : 3 /10

dimanche 22 septembre 2013

Oz (intégrale)



Synopsis : Oz. Oswald. Pénitencier de haute sécurité. Emerald city. Quartier expérimental de la prison créé par le visionnaire Tim McManus qui souhaite améliorer les conditions de vie des détenus. Mais dans cet univers clos et étouffant se récrée une société terrifiante où dominent la haine, la violence, la peur, la mort. Où tout espoir est vain, où la rédemtion est impossible. Bienvenue dans l'antichambre de l'enfer.

Genre : œil pour œil, dent pour dent


Les impressions à vifs saison par saison :

Saison 1 (9/10) : Présentation de la psychologie, du tempérament, des idéologies et des casiers judiciaires de manière progressive et prenante des différents détenus. Les intrigues sont majoritairement liées aux tensions existantes entre ces derniers. Les problèmes politiques et carcéraux sont abordés de manière bien appuyée. Le rythme et l'interprétation sont au top, le scénario d'une efficacité redoutable.

Saison 2 (9/10) : Plus fondée sur l'enquête et les origines de l'émeute, cette saison dénonce plus la corruption dans le camps des gardes pénitenciers. La série dépeint les policiers de manière parallèle aux détenus, surtout dans leurs vices. Très déprimante, avec une touche de pessimisme énorme, rien ne protège ces hommes, qu'ils soient détenus ou policiers. L'inhumanité paie plus que l'humanité : la prison transforme l'agneau en loup comme le montre le personnage de Tobias Beecher.

Saison 3 (9/10) : Cette saison est beaucoup plus axée sur les trafics de drogues et les différentes vengeances entre détenus. Parfois on se demande même comment certains s'en sortent vivants. Les personnages sont attachants grâce à la justesse de l'interprétation. Toujours beaucoup de suspense. Le rythme est encore plus effréné que dans les deux précédentes saisons. De plus en plus d'émotions sont présentes et fonctionnent à merveille, sans niaiseries bien entendu.

Saison 4 (8/10) : Le quotidien et les tensions sont toujours explosifs, on est immergé dans l'ambiance carcérale. Baisse de rythme au milieu de cette saison exceptionnellement deux fois plus longues que les autres. La routine d'Oz s'installe mais reste tout de même captivante par le duel Shillinger et Beecher en particulier. Toujours beaucoup de morts à noter. Répétition des ficelles qui commencent, le scénario se calme sur la quantité d'intrigues et prend un rythme de croisière plus lent. La note de pessimisme est à son apogée, on ne voit jamais le bout des vengeances racistes.

Saison 5 (7/10) : Le rythme est plus lent, l'émotion est au rendez-vous avec l'accident de bus. Les aryens sont de plus en plus intenables. Les intrigues continuent de devenir un peu redondantes et comme tout est toujours mené à vitesse intensive, on se détache un peu de leur intérêt. Le rendu final tombe dans le piège de la routine de la prison. L'ennui tant redouté par les détenus commence lentement à s'installer chez nous malgré toujours une interprétation grandiose et des twists scotchants.

Saison 6 (7/10) : Idem que dans la précédente saison, les ressorts sont un peu toujours les mêmes et on s'attache moins aux personnages. Une touche de fantastique s'ajoute au suspense et à l'émotion générale. Les péripéties sont toujours prenantes et nombreuses mais un peu émoussées. L'ensemble commence à stagner et comme pour la violence, c'est moins efficace qu'au début mais on reste tout de même attentif. Deux fois plus long, l'épisode final résume bien ces deux dernières saisons : des intrigues toujours saisissantes avec de beaux moments de tensions, de surprises et de bravoures mais moins intenses et plus téléphonées qu'au départ. Le narrateur Augustus Hill quant à lui est toujours impeccable et fidèle au poste du début à la fin.


Critique générale :

Oz est doté d'une grande violence psychologique ainsi que d'un pessimisme total inédit à l'époque à la télévision. Effectivement, ce n'est pas une série divertissante qui caresse dans le sens du poil son public. Au contraire, elle montre ce que le spectateur ne souhaite pas voir sur ces hommes souvent dénués de morale, qui ont commis des crimes et actes horribles. C'est aussi une des raisons qui fait qu'Oz est une série culte. Cette dernière est allé si loin qu'elle se démarque toujours de nos jours. Bien évidemment, la recette ne pas se résume pas uniquement à de la violence, de la provocation ou du sexe gratuit comme dans pas mal de séries actuelles. Aussi violentes qu'elles soient, ces dernières restent souvent très superficielles à côté d'Oz.

Signé, et cosigné sur sa fin, par son créateur Tom Fontana, le scénario de cette série est purement virtuose. Digne d'une tragédie grecque et Shakespearienne, le script possède une grande quantité d'intrigues qui s'entremêlent de manière implacable, et de nombreux personnages. Tout serait extrêmement long à développer et surtout un peu inutile d'autant plus que le wikipédia de la série le fait très bien.

En huis clos l'intégralité du temps, la série vous emprisonne avec les prisonniers d'Oz. Vous êtes comme un nouveau détenu constamment sur les nerfs et impliqué dans votre propre survie. Avec une redoutable efficacité, le scénario présente une galerie de personnages aussi charismatiques qu'ambigus. Vous êtes représentés à l'écran par le personnage de Tobias Beecher et subissez comme lui une immersion pure et dure dans le milieu carcéral. L'agneau devient ensuite loup et vous devenez simple spectateur omniscient mais impliqué dans cette survie. La prison fait ressortir l'âme de loup enfouie en vous, vous êtes lâchés dans une horde en cage. La morale est claire : la prison accentue le vice de l'Homme au lieu de le punir de ses actes. Le tout avec un ton abusivement noir, le scénario supprime rapidement toutes les moindres touches d'optimismes qu'il instaure. A Oz tout le monde est condamné, l'espoir est rarement de la partie. Le mal engendre le mal. Ce cercle vicieux pousse à commettre les actes les plus noirs et sordides, à tel point qu'on ne peut l'imaginer. Le spectateur suit ce schéma interminable à la fois dérangé, choqué et passionné.

Comme dans une fresque, vous vous appropriez le quotidien et les informations des détenus, par de brefs flash-back et une présentation par Augustus Hill. La première très grande force de la série est notamment celle d'avoir un scénario et une mise en scène qui ne laisse aucune place au remplissage. Effectivement, vous devez absolument être attentif à tous les détails donnés. Sans quoi vous pouvez vite louper un élément essentiel à l'intrigue. C'est extrêmement dense et rapide. Je dirai même trop car quelques moments de pause seraient parfois les bienvenus, ce qui fait d'Oz une série encore plus suffocante qu'elle ne l'est à la base. Les personnages quant à eux ont tous des charismes absolument époustouflants qu'ils soient attachants ou détestables. L'écriture de ces derniers possède une extrême richesse psychologique, tous ont des personnalités très amples. Tout sonne très juste et de manière implacable, le tout sans clichés ni niaiseries. Cette série shakespearienne a beau être extrêmement agressive, on ne notera toutefois jamais de violence gratuite. Les violences physiques, aussi dures soient-elles, ne sont pas aussi marquantes que les violences psychologiques. Je ne spoile pas l'intrigue ici mais ceux qui ont vu la série visualiseront sans doute de quoi je parle.

Dans ce formidable tissage d'écriture ressort différents thèmes psychologiques, religieux, politiques, sociologiques et philosophiques. Tous sont brillamment mélangés et dosés dans un scénario qui sait parfaitement placer au bon moment les éléments de manière habile et intelligente. Dans la première saison, seul le personnage de McManus porte les différents débats de manière explicite. Les thèmes se distillent de manière plus subtile dès la deuxième saison quand le personnage de McManus passe au second plan, en personnage bien plus ambigu qu'il n'y paraît. Par la suite, vous vous ferez vous-même votre opinion sur les thèmes abordés. A mon avis, si la série a un point de vue neutre sur l'ensemble des débats qu'elle ouvre, le plaidoyer principal reste l'inutilité du système carcéral dans sa globalité. La prison métamorphose l'Homme en animal. Le script ne prend donc pas vraiment de parti prit et s'affirme plus comme une peinture réaliste scénarisée qu'une série débat. La série dépeint avant tout cette société pervertie, sans limite et complètement inhumaine. La nature humaine est montrée de façon complètement animale, violente où chacun cherche sans cesse à sauver sa peau quelque soit le moyen.
L'autre grand point fort de cette série est l'interprétation. Aidés bien entendu par un scénario brillant, les acteurs portent beaucoup OZ au statut de grande série. Tous sont exceptionnels en offrant une intensité et une profondeur impériale aux différents personnages. A l'opposé de cela, on regrette une esthétique particulièrement moche due à un budget limité. En particulier les flash-back qui font particulièrement amateur. Les prises son quant à elles ne sont pas toujours très bonnes. La série assume cependant jusqu'à la fin cette faiblesse et mise tout sur ses points forts. C'est bien dommage, même si on ne peut pas reprocher à HBO de privilégier d'autres séries comme Six Feet Under.

Lorsque vous terminez Oz, c'est un peu comme si vous sortiez vous aussi d'un séjour de derrière les barreaux. Vous en sortirez marqués avec surtout l'envie de ne jamais mettre les pieds à Oz. Plus vous plongez dans l'univers de la série, plus vous serez dérangés, bousculés par cette noirceur et cette extrême violence. Cette brillante série carcérale dresse un tableau de l'être humain tout ce qu'il y a de plus pessimiste. Cependant, Oz est une série culte surtout en raison de son ton complètement inédit. C'est à la fois de plus en plus glauque et violent que pertinent et subtil. Si une baisse de rythme et d'intérêt se ressentent clairement sur les deux dernières saisons cela est dut à un rallongement un peu excessif des intrigues. Le scénario de son côté est depuis le départ savamment pensé et orchestré au mot près, tel un chef-d'œuvre. Tout le monde n'adhèrera pas à cet univers clinique et violent à la fois réaliste et inhumain. Placé un peu à mi-chemin entre Scorsese et Kubrick, Oz vous embarquera et vous marquera si vous avez un minimum d'humanité. Si vous ne traînez ni boulet ni collier électronique à la sortie d'Oz, vous aurez tout de même un effet secondaire bien embêtant et de taille : celui d'avoir l'impression de visionner un Disney lorsque vous voyez une autre prison qu'Oz à l'écran. A votre âme et péril.



Moyenne générale : 8,2 / 10

vendredi 13 septembre 2013

Le dernier pub avant la fin du monde (The World's End)




Réalisation : Edgar Wright
Scénario : Simon Pegg et Edgar Wright. 
Durée : 1 h 45
Distribution : Simon Pegg, Nick Frost, Martin Freeman...
Genre : Jamais deux sans trois

Synopsis : Le 22 Juillet 1990 dans la petite ville anglaise de Newton-Haven, cinq adolescents fêtent la fin des cours en se lançant le défi de faire une tournée épique des pubs, qu'ils n'arriveront pas à terminer. Le dernier Pub de la liste s’appelle le World's end. Vingt ans plus tard, tous les cinq sont séparés et mènent plus ou moins une vie prospère, sauf Gary King, l'ex chef de la bande. Ce dernier souhaite absolument refaire cette tournée (et la terminer cette fois) avec ses anciens amis et réussi à les convaincre. Seulement, les habitants du village n'ont pas changé en vingt ans...

Après l'excellent Shaun of the Dead et le musclé Hot Fuzz, la trilogie Cornetto s’achève avec World's End. Autant le dire tout de suite, c'est d'aussi bonne facture. Le dernier pub avant la fin du Monde (vive le titre français) mixe de manière virtuose et très drôle les deux précédents films de la trilogie mais cette fois-ci dans le genre de la Science-Fiction. Alternant une nouvelle fois un style très américain et so british, la parodie fonctionne du tonnerre (de Zeus).

Edgar Wright et Simon Pegg ont écrit un scénario une nouvelle fois original, très rythmé et terriblement efficace qui ne laisse place à aucun temps mort. On ne s'ennuie pas une seconde. Le spectateur se retrouve dans un immense patchwork jubilatoire de ce qu'il se fait mieux dans le genre. Contrairement à Voisins du troisième type d'Akiva Shaffer sorti l'an dernier qui avait la même ambition, vous ressortirez de ce cru d'Edgar Wright 2013 royalement diverti. Les ressorts sont donc un peu les mêmes que les précédents volets : un village avec des personnages louches (Hot Fuzz) qui ne sont en fait pas très humains (Shaun of the Dead). La grande force du film reste surtout les dialogues et les acteurs qui prennent un plaisir communicatif à venir jouer/déconner comme des ados attardés. Avec un casting au poil comme d'habitude (Brosnan est un choix épatant), tous les acteurs sont crédibles et drôles dans cet hommage complètement déjanté qui va de La guerre des Mondes à The Full Monty. Pour notre plus grand plaisir Simon Pegg et Nick Frost se sont inversés leurs rôles et ça fonctionne parfaitement.

La mise en scène d'Edgar Wright est toujours aussi maîtrisée, inventive, ainsi qu'accompagnée d'une très bonne bande son (de Primal Scream à The Doors). Niveau montage, le festival de raccords fluides et implacables est toujours au taquet, à l'image d'Hot Fuzz ou encore de Scott Pilgrim, rien à signaler de ce côté là... Ce qui fait la différence ici, c'est le scénario qui ne manque ni de ressource, ni de mordant et encore moins de charme pour rendre le film encore plus réjouissant. World's end est à mon goût meilleur que les deux précédents films du cinéaste, moins technique mais plus judicieux, comme Shaun of the Dead (toujours son meilleur à l'heure actuelle). Les fans du cinéaste et du genre en auront donc pour leur argent. Comme pour Scott Pilgrim, ces derniers auront parfois du mal à voir le film, cause à une distribution lamentable. Il faudrait limite être parisien pour le voir en version originale, la version indispensable pour ce genre de film (une seule salle lyonnaise l'a distribué en VO, sur trois salles, et seulement la deuxième semaine).

A l'image des deux précédents volets, World's end est une parodie aussi virtuose que référencée et qui fonctionne au cordeau formellement. Cette saga porte donc bien l'étiquette de la célèbre marque de glace : quelque soit son parfum, elle reste savoureuse.


Note : 8/10



samedi 24 août 2013

Shokuzai

Première partie : Celles qui voulaient se souvenir



Réalisation et scénario : Kiyoshi Kurosawa
Durée : 1h50
Distribution : Kyôko Koizumi, Hazuki Kimura, Yû Aoi...
Genre : Psycho-thriller de mœurs

Synopsis : Dans la cour d'école d'un paisible village japonais, quatre fillettes sont témoins du meurtre d'Emili, leur camarade de classe. Sous le choc aucune n'est capable de se souvenir de l'assassin. Asako, la mère d'Emili, désespérée de savoir le coupable en liberté, convie les quatre enfants chez elle à les mettre en garde : si elles ne se rappellent pas du visage du tueur, elles devront faire pénitence toute leur vie. Quinze ans après Sae et Maki veulent se souvenir.

Cette première partie contient les deux premiers portraits d'une série japonaise de cinq épisodes. Si dans la forme le rendu final est sûrement un peu tronqué, cela ne dérange pas beaucoup tant l'intrigue à la base est prenante. Si ce n'est pas l'idée du siècle bien sûr, cette intrigue bénéficie d'un scénario qui part en contre pied du thriller hollywoodien formaté que l'on a l'habitude de voir, comme pour pas mal de bons films asiatiques vous me direz. Seulement, Shokuzai vaut le coup d'œil encore une fois pour ce charme assez unique et propre à ce cinéma mais aussi parce qu'il n'est pas destiné uniquement à son public asiatique. Le scénario et le cinéaste nous délivre des portraits de femmes en guise d'enquête, c'est tout simplement captivant.

Les réalisateurs asiatiques nous offrent souvent des perles cinématographiques. Je pense notamment à mon préféré Bong Joon Ho avec Memories of murder ou encore Mother qui sont des polars peu conventionnels et absolument magnifiques. Kiyoshi Kurosawa n'est ici pas aussi virtuose que Bong Joon Ho mais nous permet tout de même de plonger dans le quotidien des témoins, enfermés dans leur culpabilité et leur souvenir, d'une manière lente et angoissante. Un cinéaste talentueux nous tient donc en haleine avec un scénario et une mise en scène intéressants qui prennent le temps de faire monter la tension afin de nous emballer. Les différents portraits nous font rapidement oublier l'intrigue policière au point de ne presque plus y penser. Nous sommes plongés dans un cinéma à la fois fantastique, clinique, et le tout dans un registre assez malsain. Beaucoup de thèmes psychologiques se dégagent des portraits habilement écrits et dépeints avec une étrangeté fascinante.

Si le film a un certain charme, je souligne malgré cela que l'interprétation n'est pas toujours brillante. Il faut dire que les dialogues ne sont pas là pour les aider, ces derniers étant même mauvais lorsqu'ils ne sont pas fades. Techniquement, la photographie est digne d'un téléfilm. L'ensemble des plans n'est pas toujours homogène et la patte personnelle en pâti.

Malgré ces défauts, le montage est intéressant et le scénario est agréablement étalé (comme une série télé donc), l'engagement de nous captiver est donc tenu. Si le cinéaste nous dépeint une vision pessimiste de la société japonaise grâce à des caricatures plus ou moins grossières, il nous envoûte et nous transporte avec son ton fantastique. C'est l'essentiel car cela me donne envie de voir la suite, si ce n'est pour l'intrigue principale ce sera pour ces portraits psychologiques très intéressants.

Note : 7 / 10



Deuxième partie : Celles qui voulaient oublier



Réalisation et scénario : Kiyoshi Kurosawa
Durée : 2 h 30
Distribution : Kyôko Koizumi, Sakura Ando, Chizuru Ikewaki...
Genre : Psycho-thriller de mœurs

Synopsis : Contrairement à Sae et Maki, Akiko et Yuka veulent oublier le drame. La mère d'Emili cherche toujours pénitence envers elles et recherche toujours le meurtrier quinze ans après.


Après une première partie envoûtante malgré ses défauts, Shokuzai celles qui voulaient oublier propose cette fois trois portraits avec bien entendu à la fin celui de la mère d'Emili: Asako Adachi. Les portraits ont été classés du plus au moins glauque même s'ils gardent tous un côté malsain dans le jeu sadique d'Asako. Une nouvelle fois les peintures collent parfaitement à la psychologie du personnage présenté. Il faut peu de temps pour découvrir les personnages d'Akiko et de Yuka, plus antipathiques et atypiques que ceux du premier volet. Ces deux portraits sont réalisés avec simplicité, avec pas mal d'ambiguïtés dans celui de d'Akiko, et pas mal d'humour noir dans celui de Yuka.

Très psychologique encore une fois, ces portraits se fondent sur le traumatisme causé par ce fameux meurtre. Pénitence ou pas, chacune sont touchées par cette journée qui est clairement l'axe du film. Cette galerie de personnages est clairement le vrai charme de Shokuzai. L'audace de passer du thriller classique au film à sketchs d'études psychologique n'est pas si commun. Le traitement est le même que dans le premier volet, le scénario est toujours bien ficelé et surtout captivant.

Dans le dernier portrait, celui d'Asako, l'intrigue policière reprend sa place principale. Malheureusement, ce portrait un peu trop alambiqué ne laisse que très peu de place au hasard dans le dénouement final. Cependant, étant donné que la culture japonaise croit beaucoup au destin, cela fonctionne. Le genre passe donc du thriller psychologique au thriller familial que l'on a vu plus habile et virtuose ailleurs. Je ne spolierais donc pas le final mais la découverte du tueur n'est pas ce qu'il y a de plus intéressant ni de plus riche dans ce film.

Les portraits sont beaucoup mieux écrit, denses et développés que le dénouement. Ces femmes sont enfermées non seulement dans leurs différents traumatismes (dont un en commun) et dans une société misogyne. Si les dialogues sont assez fades une nouvelle fois (dut à une mauvaise traduction peut-être ?), la mise en scène est toujours justement menée ainsi que son scénario. Les acteurs sont égaux à eux-même.

Ce double film reste captivant par ce rythme feuilletonnesque à la fois rapide et prenant. Malgré pas mal de faiblesses niveau direction d'acteur, dialogues, intrigue policière ou même technique, Shokuzai est réalisé par un cinéaste qui nous hypnotise. Complètement opposé au cinéma très formaté que l'on a l'habitude de voir actuellement, tout est extrêmement linéaire : ça commence par un point A pour finir a un point B en prenant le temps de nous embarquer, sans trop mâcher le boulot au spectateur. Pas de flash-back et d'effets à n'importe quelles sauces stylistiques non plus. Je ferai même la remarque que pour un film asiatique tout cela est agréablement sobre.

Une honnêteté et un ton fantastique digne des premiers films cliniques de Polanski ou Cronenberg (à la sauce légèrement orientale) se dégagent dans les meilleurs moments de ces portraits. On ne peut pas dire que Shokuzai soit un chef-d'œuvre, il a même l'allure technique d'un téléfilm mais il a beaucoup de charme et c'est suffisant pour vous dire que c'est assurément un diptyque à découvrir.

Note : 7 / 10


P.S : Au Japon, les films ont étés présentés sous la forme d'une mini-série de cinq épisodes diffusée à la télévision en Janvier 2012. (Secrets de tournages / Allociné).

dimanche 18 août 2013

Insaisissables (Now you see me)



Réalisation : Louis Letterier
Scénario : Ed Solomon, Edward Ricourt, Boaz Yakin
Durée : 1h56
Distribution : Jesse Eisenberg, Mark Ruffalo, Isla Fisher, Morgan Freeman...
Genre : Sous Nolan

Synopsis : « Les quatre cavaliers », un groupe de brillants magiciens et illusionnistes, viennent de donner deux spectacles de magie époustouflants : le premier en braquant une banque sur un autre continent. Le deuxième en transférant la fortune d'un banquier véreux sur les comptes en banque du public. Deux agents spéciaux du FBI et d'Interpol sont déterminés à les arrêter avant qu'ils ne mettent à exécution de réaliser des braquages encore plus audacieux.

Le dernier film du français Louis Letterier est un blockbuster classique qui flirte sur la vague de la mode Nolanienne. Quand on sort de la salle on regrettera un scénario trop tiré par les cheveux qui rend le tout non crédible et surtout idiot. Sans vouloir spoiler, le personnage de Woody Harrelson (le plus drôle) connaîtrait le dénouement final dès les vingt première minutes. Après une demie-heure, le réalisateur et son scénario trouvent leurs limites. La recette des twists est trop utlisée (trop de twists tuent le twist), la touche too much et sa love story, très laide, n'aident pas les choses. S'ajoute à cela la mise en scène et la prestation des acteurs qui stagnent tout le long en pilotage automatique.

« Faux-Raccord » pourrait faire un épisode d'une heure rien que sur ce film. Louis Letterier est donc toujours le maître incontestable de la spécialité et n'a pas grand chose de nouveau dans son chapeau. Le cinéaste n'a toujours pas acquis un excellent savoir-faire technique et c'est toujours aussi plat et impersonnel. Le savoir-faire de l'école Besson se ressent sur les courses poursuites et la direction plutôt fade donne à ce blockbuster un aspect un peu cheap. Les blagues Franco-américaines y sont très lourdes tout comme le final digne d'un film français qui veut faire du cinéma hollywoodien. On notera que ce qu'il y a de plus Nolanien ici reste le casting : beaucoup de grosses pointures gâchées.

Un scénario qui chercherait moins à nous manipuler et un cinéaste avec plus de talent (Soderbergh) ou simplement avec du savoir-faire (Mangold) aurait certainement rendu ce tour de magie plus brillant. Si cela reste actuellement le film le plus agréable à regarder du cinéaste, il n'en reste qu'un film du dimanche soir aussi vite vu qu'oublié. On notera les qualités d'un blockbuster classique avec du rythme et des acteurs plaisant : c'est le minimum syndical. Too much et incohérent à souhait, Insaisissables divertit tout de même. C'est ce qu'on lui demande avant tout dans cet été bien vide de film, d'où son succès au box office.


Note : 4 /10

vendredi 16 août 2013

Room 237



Réalisation : Rodney Ascher
Durée : 1h47
Distribution : Jay Weidner, Buffy Visick, Scatman Crothers...
Genre : Not shining

Synopsis : Room 237 mêle les faits et la fiction à travers les interviews des fans et des experts qui adhèrent à certaines théories.

Que l'on soit fan ou pas de Stanley Kubrick, on ne peut ne pas lui reconnaître son statut de cinéaste visionnaire, virtuose doté d'une très grande intelligence. La plupart de ses films sont des chefs d'œuvres intemporels qui allient film d'auteur et film grand public. Tous sont parsemés de significations, plus ou moins extrêmes, sur les vices de l'Homme en général. Son film d'horreur culte Shining fait parti de la liste de ses chef-d'œuvres.

C'est donc avec une grande curiosité que je suis allé voir Room 237, un film documentaire peu distribué dans les salles, dans lequel des grands fans du film sont censés « analyser » le film.
L'avertissement au début nous certifie que toutes les interviews sont indépendantes des points de vue du cinéaste, des acteurs, distributeurs et producteurs du film, et c'est bien vrai, les différents protagonistes ne s'appuient sur rien de sensé, et leurs monologues se focalisent au final sur des détails plus ou moins fumeux.

Les intervenants (inconnus au bataillon et non présentés) ne s'attardent que sur des détails. Semblables à des étudiants en cinéma sous acide, ils nous servent une analyse de film image par image. Chose que tout le monde peut faire devant n'importe quel film en faisant dire n'importe quoi au réalisateur. Sans introduction, Room 237 ne prend même pas la peine de nous présenter le film, et les différentes versions qui existent. Rodney Ascher glisse quelques images de films du cinéaste (Eyes Wide Shut en particulier), ainsi que de vieux films et archives assez illustratifs des théories fumeuses développées, le tout sur une musique horrible faite en trois minutes au synthé. Visuellement on dirait un document amateur fait en deux jours. La qualité audio est mauvaise, l'image laide : un comble pour un film qui s'intéresse autant au détail de l'image.

Sans fil conducteur, ce documentaire est surtout un recueil de témoignages non construits et pas captivants pour un sou. Les intervenants exposent parfois des points de vue intéressants, mais l'abondance de détails énumérés les uns après les autres ne cachent au final qu'un manque d'analyse en profondeur. Pour donner quelques exemples, ils nous font remarquer les faux-raccords, mais ne nous expliquent pas leur utilité, de même avec les symboles freudiens. Deux témoignages pointent du doigt l'Holocauste et le génocide des indiens mais s'avèrent vite plus superficiels que révélateurs. On se retrouve vite à analyser des petits détails qui mènent à un jeu comme « des chiffres et des lettres » : Les comptes sont peut-être bons pour arriver à 42 mais rien de plus (42 = Holocauste, oui mais le sens ?). Rien de bien cousu donc. Le pire est que l'intervenant ne va parfois même pas jusqu'au bout de son idée !

Absolument rien n'est approfondit et encore moins pertinent. Même lorsqu'on flirte avec les axes principaux du film, le n'importe quoi et le grotesque prennent le dessus. L'intervenante tente de nous impressionner avec sa théorie (ou plutôt celle de son fils) de l'homme au visage fendu en deux par la foudre (what the fuck ?). La paranoïa atteint son apogée avec la chambre qui aurait un rapport avec la thèse du complot d'Apollo 11. Kubrick aurait filmé en studio le premier pas sur la Lune. Ces rumeurs sont aussi bancales que ce documenteur. Au lieu de faire une analyse plus simple (du film et non d'une pauvre boîte de conserve), on préfère donc faire avaler des couleuvres au public, comme par exemple avec un skieur qui serait en fait un Minotaure, ou encore une double lecture du film dans le sens propre du terme complètement ridicule. Outre une idée d'illuminé (le blogger de l'analyse du film n'a pas voulu répondre à l'intervenant) on remarquera surtout que le film analysé est la version américaine, et non la version européenne qui est la version définitive de Kubrick. Je terminerai en beauté si je puis dire, Stanley Kubrick serait un Dieu qui sculpterai sa tête dans les nuages pour le plan d'ouverture de son film !

Grâce à Room 237, Kubrick doit se retourner dans sa tombe ! C'est d'un amateurisme effrayant, les théories sont totalement farfelues ou carrément fumeuses. Si l'envie prenait un spectateur qui n'a pas vu Shining d'aller quand même voir ce documentaire, il ne saurait au final même pas de quoi parle le film de Kubrick si ce n'est d'une famille dans un hôtel. Je regrette le manque d'intervenants sérieux comme des grands cinéastes, des spécialistes de Kubrick ou même des acteurs du tournage, qui auraient pu confirmer ou infirmer certaines des théories exposées. Room 237 possède surtout le paradoxe de parler de la puissance des images, mais de ne travailler quasiment jamais avec. J'en suis ressorti avec le dégoût d'avoir perdu temps et argent, 10€50 pour des discussions de bar qui tournent très vites à vide, ça fait cher le café ! Cela mis à part, si on peut sauver un peu du fond ce ne sera pas le cas de la forme : Room 237 est sûrement le documentaire le plus moche que j'ai eu l'occasion de voir.

J'attends toujours une vraie analyse du cinéma de Kubrick autant que le photoshop de la tête du cinéaste dans les nuages. Passez votre chemin sur ce recueil de témoignages plus fumeux qu'autre chose. L'unique point positif de ce documentaire est qu'il nous rappelle qu'il est important dans un film de faire attention aux images et aux détails que le cinéaste nous offre avec soin méticuleux. Si vous cherchez une analyse de ce film, je vous conseille plutôt de lire (ou relire) la bibliographie de Freud, ce sera toujours plus pertinent.

Note : 02 / 10


« DES ''BALIVERNES'' SELON L'ASSISTANT-REALISATEUR
Pourtant, selon Leon Vitali, l'assistant de Stanley Kubrick sur Shining et présent pendant les 13 mois de tournage qui se sont majoritairement déroulés à Londres, ces théories sont la plupart du temps farfelues. Interrogé par le New York Times, il précise qu'il était ''plié en deux'' pendant la projection de Room 237 et évoque des ''balivernes''.
Pour le fameux pull de Danny, Leon Vitali explique que Stanley Kubrick voulait un vêtement ''fait maison'' et la costumière Milena Canonero est revenue avec un pull ordinaire et a déclaré : ''Et pourquoi pas ça ?''. Pour ce qui est du calumet évoqué par Bill Blakemore, l'assistant réalisateur affirme que Stanley Kubrick ne l'a pas choisi comme d'une référence au génocide indien mais parce que la boite de levure avait des couleurs ''brillantes''.
Leon Vitali est lui sûr d'une chose : Stanley Kubrick n'aurait pas écouté 70 à 80% de Room 237. Il n'y aurait vu que du ''pur charabia''. »


mardi 30 juillet 2013

Court-métrage et clip.

Voici une petite présentation de mes deux petites réalisations. 

Je commence par Ainsi parlait Jésus.



Réalisé dans le cadre du baccalauréat cinéma option facultative en 2009, ce court métrage est très largement inspiré du film culte C'est arrivé près de chez vous de Remy Belvaux, André Bonzel et Benoît Poelvoorde. Cependant j'ai pris le choix de faire faire un monologue au personnage principal comme dans le fameux court-métrage A sense of history de Mike Leigh. Cela permet d'être plus efficace et de mettre en avant le personnage le plus rapidement possible car la durée maximale autorisée est de 10 minutes.

Comme c'était un projet d'examen où tout doit être justifié, la mise en scène ne se prive pas techniquement d'être en contre plongée. Cela pour montrer que nous suivons Jésus et personne d'autre, qu'il est sans cesse mit en valeur. Au point même que lorsque le soleil nous gêne par un fâcheux contre jour, une auréole d'ange se forme autour de la tête du héros. Contrairement aux plans séquences de captation directe, l'introduction ainsi que le générique ont un montage beaucoup plus fictionnel. La fiction est une chose qu'il ne faut jamais oublier devant une interview ou un documentaire : il y a toujours de la manipulation. Comme voulu dans le scénario, la mise en scène que j'ai essayé d'établir tente d'équilibrer le côté noir et l'humour afin de rendre à la fois attachant et détestable ce tueur extravagant. 

La bande annonce placée avant le court métrage accentue le côté prétentieux du personnage. On peut penser que ce soit Jésus lui-même qui s'occupe du montage, fait une promo pour une genre de secte ou tout simplement un communiqué qui met en valeur sa philosophie. Ce qui voudrait dire que c'est personnage véridique. Cette même bande annonce donne un côté Terminator que je n'ai pas pu développer avec celui de Nosferatu  où Jésus déambule dans son cimetière comme un démon mi-justicier, mi vampire. Cette bande annonce ne devait pas y être au départ mais parfois les erreurs font bien les choses. 

Et l'histoire dans tout ça ? Il faut avouer qu'elle n'est pas très claire. Ce serai l'interview d'un jeune croque mort qui se prend pour le fils de Dieu, en mission sur la Terre. Ce dernier justifierai un peu sa situation, sa profession de l'ombre ou vanter son plaisir de droit de vie ou de mort sur ses clients (ou téléspectateurs) devant la caméra d'un journaliste. Comme une interview à la télévision, on ne capte que certaines bribes du personnage et donne un rendu avec un non dit assez important. Toute l’ambiguïté est donc sur le dosage de ce jeu du dit et non dit ainsi que celui de l'imagination du spectateur. Manipulation ou vérité ?  Là où le film de Belvaux, Donzelle et Poelvoorde finit par trouver ses limites à la fin à mon goût. L'ambiguïté et le jeu fiction vérité sont ce qui me plaîsent le plus dans ce premier projet.

Côté interprétation j'ai pu compter sur un excellent acteur. Julien porte le costume à merveille et campe magistralement le rôle. Il est vrai que j'ai écris le rôle sur mesure mais il faut le talent d'acteur derrière pour assurer, et j'avoue que Julien porte beaucoup sur ses épaules ce court métrage. Accompagné des musiques des Rolling Stones et de Lou Reed qui harmonisent le ton que je souhaitais au départ, le rendu final correspond assez fidèlement à ce que je visualisais à l'écriture.

Avec le recul je pense que c'est un court-métrage dont j'ai réussi à me faire plaisir tout en étant intéressant auprès des professeurs et du jury. Si Ainsi parlait Jesus a remporté le Grand Prix de Ciné en Herbe Montluçon en 2011 (ex-æquo avec Massacre à la pellicule co-réalisé avec Julien ) le fait également qu'il m'ait offert une bonne note à l'examen n'est pas le plus important. Ce sont juste des petits bonus qui font plaisir car les récompenses de ce genre ne sont jamais très objectives. C'est avant tout un projet que j'aime et dont j'espère vous touchera. 

Avec Julien Centrès, Jean Riou. 


Je passe au clip réalisé pour le groupe DEJA VU - Vice de forme.



Sur une idée originale d'Isaure Claire, claviériste du groupe sur l'album Leptis Magna, Vice de forme est au final un clip très illustratif de la chanson. Dans un Monde parfait, un homme s’aperçoit que tout son entourage est exactement comme lui. L'idée à la base était la prise de  conscience du personnage avec des modèles qui lui ressemble de plus en plus. 

Le style sixties de la chanson m'a plu dès la première écoute. Les paroles m'ont directement font penser au phénomène de la mode en général. Tout comme à 1984, dont l'album en général par son aventure me fait directement penser. D'ailleurs le livre de poche (commun) des différents personnages est le classique d'Orwell : un clin d'oeil en guise de mise en abyme. 

Comme dans la pure tradition du clip : c'est avant tout un exercice de montage. Même si un petit scénario est présent, le montage illustre l'idée du clip. Techniquement on commence par un plan amateur qui bouge pour terminer que sur du fixe et rendre plus froid les copies et le final : tel l’état d'esprit du personnage. Le parti prit de la mise en scène prend le principe du cinéma muet (Charles Chaplin) ou pseudo muet (Jacques Tati) avec la simplicité comme objectif principal. On peut ainsi suivre l'histoire et écouter les paroles en même temps. A l'image de la chanson, un effet super 8 sixties fait ressembler le clip à un genre de vieux film de pote qui reprend les codes du cinéma muet. Un peu comme si on parodiait Chaplin dans les années soixante. 

Pour l'interprétation du personnage principal, Julien (oui c'est mon acteur fétiche pour l'instant) livre une excellente prestation rétro. Vice de forme est un exercice de mise en scène et de montage dont le résultat est exactement comme je le pensais au départ. S'il y a moins de plan que dans le découpage original, l'idée ainsi que le ton désiré sont bien présents. C'est bien l'essentiel !

Avec : Julien Centrès, Pierre-Emmanuel Vuillaume, Samuel Ferreira. 
Chef opérateur : Thibault Cohade. 
Montage : Isaure Claire et Guillaume Couturier. 
Idée originale : Isaure Claire.

Groupe : Deja vu
Album : Leptis Magna
Année : 2013