lundi 28 décembre 2015

Au-delà des montagnes ( Shan He Gu Ren )



Réalisation et scénario : Zhang-Ke Jia
Durée : 2 h 
Interprétation : Zhao Tao, Sylvia Chang, Zhang Yi...
Genre : Etude bouleversante 

Synopsis

En 1999 en Chine, Tao est courtisée par deux amis d'enfances Zang et Lianzi. Zang est capitaliste financier tandis que Lianzi est travailleur dans les mines de charbon. Tao choisit Zang qui lui promet d'avoir une vie confortable pour élever son fils. On les retrouve 15 et 25 ans plus tard. 

Voici un cinéaste qui a du cran et qui le montre bien. Il le montre autant dans la forme que dans le fond de son film qui dépeint un pays dépassé par la vitesse de sa croissance. Un pays où l'être humain et ses traditions ont du mal à suivre la modernité en entraîne une rupture effroyable. Vision juste et éblouissante aussi bouleversante que pessimiste, le cinéaste signe étude sociale et psychologique, vraiment convaincante. 

Au delà des nuages mais aussi également des conventions. Le cinéaste commence avec un format quatre tiers sous la forme du documentaire et des situations drôles et tristes très théâtrales. Il y a une touche de gaieté et d'innocence qui se ressent dans cette fin des années 90. Des mélanges de traumatismes et de doutes se mêlent à la psychologie mais aussi de passations de coutumes et problème de travail. On pense un peu au cinéma de Bertolucci par moment, mais c'est surtout celui d'un cinéaste qui n'a pas peur d'utiliser le langage cinématographique pour défendre ses intentions. Tout est extrêmement important pour la suite, même si je trouve que cette première partie est un peu longue. 

Après cette tranche d'environ 50 minutes, le titre et le nom du réalisateur s'affiche pour laisser place à notre époque. Le cadre s'ouvre mais pas complètement et avec une formidable écriture et interprétation remarquable, on découvre passionnément ce qu'il s'est passé chez les protagonistes durant ces quinze années. Ecriture plus épurée avec beaucoup de mise en abyme et de symboles, le film devient vite fascinant. Toutes les cassures de la société se dévolent à travers ces personnes qui se brisent ou/et qui continuent dans leur chemin sans état d'âme. 

Très nuancée, cette seconde partie nous prépare pour une troisième qui nous fait basculer dans un futur proche, soit dix années plus tard. La vision est pessimiste, triste mais à la fois magnifique à travers l'image que représente la mère. Entre humour, drame, émotion et critique d'une société qui a tout oubliée, la partie trouve sa parfaite harmonie. Le cinéaste agrandit le cadre et signe un constat effrayant sur la réussite en Chine. Formellement c'est à l’opposée de la première partie et on ne peut que constater un pessimisme permanent. Le grand et seul tour de force est une image du temps et des sentiments d'une mère pour son fils qui restent intemporels. Si plein de thèmes sont superbes, parfois magnifiquement traités, la danse finale de Tao reste ce qu'il y a de plus fort et de beau dans le film. Un formidable dernier plan rappelant Mother de Bong Joon Ho. 

Si l'interprétation est excellente le film lui manque finalement un peu de force et de développement pour s'approcher d'un chef d'oeuvre. Le cinéaste a réussit beaucoup de choses ainsi qu'un grand tour de force à la fin. Cependant, pour en tirer vraiment la grande force du film, je pense qu'il aurait fallu que les deux dernières parties soient plus longues, quitte à être plus explicatif. Finalement ce petit déséquilibre handicape les messages certes sublimes, et c'est un peu dommage. Cependant, Au-delà des montagnes est un film hautement recommandable par sa richesse et sa beauté. Du très bon cinéma. 

Note : 9 / 10

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