mercredi 7 octobre 2015

Sicario



Réalisation : Denis Villeneuve
Scénario : Taylor Sheridan
Durée : 2 h 
Interprétation : Emily Blunt, Benicio Del Toro, Josh Brolin, Jon Berntal... 
Genre : Pas de quoi sortir le briquet

Synopsis

Kate, une jeune recrue du FBI, est retenue pour intervenir dans le territoire de non droit entre les Etats-Unis et le Mexique. Elle y est enrôlée pour stopper le trafic de drogue entre les deux pays. Seulement pour obtenir des réponses et des solutions, il faut faire face à des solutions qui ne sont pas toujours légales. 

Une chose est sûre, Denis Villeneuve est un bon réalisateur et ça se confirme pendant ces deux heures. Hélas avec Sicario il confirme également qu'il ne sait toujours pas bien choisir son scénario. Si son policier est réalisé comme un brillant film de guerre dans la forme, le scénario reste trop pauvre et maladroit pour convaincre. 

Avec une bande son efficace et de beaux morceaux de bravoures dans la niveau mise en scène, notamment dans les montées de suspense, Sicario vaut son coup d’œil. Idem pour le casting globalement solide, surtout porté par le génial Benicio Del Toro qui, une nouvelle fois, tire le film par le haut. On retrouve un goût de la photographie classique et bien appliqué, un montage soigné et un rythme qui négocie très bien la tension globale du film, aussi bien dans le dialogue que dans l'action. 

Le problème selon moi vient du scénario. Il est plat, sans rebondissement et finalement assez maladroit. On se demande un peu les intentions de départ si ce n'est montrer que la corruption existe dans les deux camps, soit un peu partout aux Etats-Unis. C'est pas neuf, les premiers films noirs nous le montraient déjà et bien mieux. Un peu too much de prendre un personnage si naïf et frêle comme Kate dont on ne prend pas spécialement empathie. Elle manque de charisme et de développement autant sur le papier qu'à l’écran. Emily Blunt, au jeu parfois un peu frêle, n'est pas à la hauteur de cet univers, surtout face aux autres grands acteurs. Comme Jodie Foster dans Le silence des agneaux Kate incarne l'innocence et la jeunesse face au mal. Seulement elle peine à nous touche et patauge souvent dans la semoule, à l'image de son personnage dans le film. Toute l'intrigue principale se devine quant à elle dès les premières minutes du film, tout du moins dès que les personnages principaux sont présentés. Le scénario ne donne ensuite que du champs libre à la mise en scène du cinéaste. Une histoire plutôt simple et sans rebondissements, ni réflexions qui se suit de manière agréable mais sans véritable intérêt. Du coup on a des scènes de traques très bien réalisées mais plus étirées et spectaculaires qu'utiles à l'histoire. Côte psychologique, c'est pas très fouillé non plus, tout trouve rapidement ses limites. Le plus tâche reste le point de vue du camps adverse de la famille du policier avec le garçon qui veut jouer avec son père. Séduisant au début cette intrigue à la Innaritu devient vite un feu de paille qui ne sert à rien du tout. Une grosse maladresse qui donne une mauvaise impression de tentative raté. 

Prisoners possède des maladresses et de longueurs qui l'handicapent mais a un scénario souvent palpitant dans les règles du genre. Sicario quant à lui est plus court mais très prévisible et manque tout le long d'originalité. Il manque également de force dans son cheminement, surtout sur son final qui montre rapidement ses limites, se reposant uniquement sur les épaules de l'acteur Benicio Del Toro, entre Javier Bardem de No Country For Old Men et Anthony Hopkins en Hannibal Lecter. On est très loin des films comme Les infiltrés ou L.A Confidential qui atteignent dans le domaine une force, une virtuosité absolue dans les rapports de force et la manipulation. Le scénario de Sicario manque de virtuosité mais surtout de ton. On dirait que le scénariste s'ennuie de nous raconter son histoire, et du coup nous aussi. Résultat on a que les acteurs à se mettre sous la dent et un metteur en scène qui se croit souvent en croisade pour les Oscars. Si la forme n'était pas si grandiose, le film serait mauvais car dépassé les vingt premières minutes, le scénario n'est pas à la hauteur de la mise en scène. Dommage que cela se prenne autant au sérieux car on suit un polar qui se veut bon mais qui en réalité est médiocre. 

Villeneuve manie à merveille les codes pour le meilleur ou pour le pire, c'est à vous de voir si vous aimez ou pas, les amateurs de Prisoners aimeront sans doute car c'est une nouvelle fois efficace à défaut d'être personnel. Vivement que le cinéaste trouve un bon script et dépasse le stade de simple illustrateur débordant de talent. Il se retrouve ici entre le bon faiseur comme Taylor Hackford et le cinéaste capable de marquer les esprits, comme un certain David Fincher. Au prochain coup peut-être ? Espérons. Dans le thème, revoyez ou foncez vers un des meilleurs films de Steven Soderbergh et un Benicio Del Toro génial : Traffic

Note : 4,5 / 10

Si certains plans font penser à No Country For Old Men des frères Coen, c'est normal ce n'est pas que l'univers mais bien le même chef opérateur qui signe la photo ici.  

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