vendredi 22 mai 2015

La Tête haute



Réalisation : Emmanuelle Bercot
Scénario : Marcia Romano et Emmanuelle Bercot
Durée : 1 h 50
Interprétation : Rod Paradot, Benoît Magimel, Catherine Deneuve, Sara Forestier...
Genre : Demi coup de poing

Synopsis

Le parcours éducatif de Malony de six à dix huit ans qu'une juge pour enfants et un éducateur tentent inlassablement de sauver.

Difficile de s'empêcher de comparer ce film avec le dernier de Xavier Dolan Mommy sensiblement sur le même thème. Pourtant il y a beaucoup de différences entre les deux. Ils sont totalement opposés au niveau de la relation mère et du fils, et au niveau de la démarche, elle est ici bien plus documentaire sur la justice et les rouages, les engrenages de la société que dans l'écriture émotionnelle appuyée de chez Dolan. La Tête haute est un portait aussi saisissant que sobre avec une véritable révélation en tête d'affiche : Rod Paradot. 

J'ai bien apprécié le film de manière générale bien qu'il y ai parfois des maladresses, des clichés un peu attendus ou pas toujours aussi frais que le reste. Si parfois des acteurs ne sont pas à la hauteur des autres (procureur en tête) le film dégage un rythme et une énergie de cinéma social à l'anglaise qui fait du bien dans le paysage cinématographique français. Bien que le fond soit trop respectueux, qu'il manque de point de vue plus engagé et de cynisme, le film n'est jamais barbant, ni ennuyeux. La cinéaste file droit dans l'esprit de la personnalité impalpable de ce jeune homme qui a du mal à fixer ses repères entre sa vie personnelle, la vie sociale et la justice. Le scénario brasse le noir et le blanc mais reste toujours dans la justesse, entre le noir, la violence et l'espoir à l'image de l'interprétation. Deneuve reste juste malgré son jeu moins réaliste et naturel que les autres, c'est un juge, un médiateur qui temporise de manière impeccable les débats. Benoît Magimel joue bien également un rôle sensible mais pas assez développé à mon goût et enfin Sara Forestier en fait des tonnes pour notre plus grand plaisir, elle est détestable à souhait et représente l'ensemble du venin du film. 

L'écriture n'est pas toujours subtile mais reste constamment dans la nuance et n'entre jamais dans la niaiserie ou la noirceur gratuite ce qui est plutôt remarquable. On sent que tout ne s'arrange pas rapidement, qu'il y a des hauts et des bas, des moments zappés et ambigus. La narration travaille bien là dessus, le non dit sur le temps qui passe à l'écran comme dans le chemin de Malony. La grande particularité du film est d'avoir une grande force motrice porté par un acteur d'un magnétisme assez époustouflant. Rod Paradot est le tracteur de l'ensemble, il porte clairement le film par son interprétation impressionnante. La cinéaste n'épargne pas les clichés mais reste réaliste et captivante de sincérité en choisissant de ne pas jouer sur le sentimentalisme. Elle met en valeur autant qu'elle critique le système juridique et social français, exactement comme le monde des adultes aux yeux du jeune homme. 

Si La tête haute est loin d'être un chef d'oeuvre, c'est un demi coup de poing qui possède une énergie et une justesse qui rafraîchit le cinéma français par sa démarche non prétentieuse, loin d'être stylisée et jamais pompeuse ni lourde. Je recommande de le voir pour la peinture sociale qui en est faite avec une certaine rigueur et une forme d'une indéniable efficacité. Le film nous laisse assez pensif sur le non-dit sur ce bon et mal développé tout le long ce qui est au final sans prise de risque mais très intéressant. Ceux qui n'aimeront pas ne pourront que constater la force d'interprétation d'un jeune acteur impressionnant du début à la fin. Ceux qui ont aimés Dog Pound de Kim Chapiron et Mommy de Xavier Dolan devraient bien aimer ce film. Je le recommande. 

Note : 7 / 10

Aucun commentaire: