vendredi 6 mars 2015

Le conte de la princesse Kaguya ( Kaguya-hime no monogatari )



Réalisation : Isao Takahata
Scénario : Riko Sakaguchi et Isao Takahata
Durée : 2 h 15
Avec les voix de : Aki Asakura, Kengo Kora, Takeo Chii...
Genre : Chef d'oeuvre

Synopsis :

Kaguya "la princesse lumineuse" est découverte dans la tige d'un bambou par des paysans. Elle grandit très rapidement et devient vite courtisée par les plus grands du pays. 

Après une longue attente de dix mois assez étonnante de la sortie du DVD/Bluray du plus beau et grand film de l'année 2014, un second visionnage m'a confirmé la grandeur de ce chef d'œuvre. Il est assez scandaleux que les Oscars aient préférés récompensés un Disney mineur (Les nouveaux Héros) à côté de ce chef d'œuvre absolu qui restera comme un des plus grands films du cinéma. Dans tous les cas, que vous soyez fan de cinéma d'animation ou pas, c'est un film à ne pas rater.

Quelques mois auparavant c'était au tour de Hayao Myazaki de faire ses adieux au cinéma avec Le vent se lève, un film étonnamment plus classique et sobre dans sa culture fantastique traditionnelle que ses précédents. Pour son dernier film, le réalisateur du Tombeau des Lucioles adapte un conte très célèbre au Japon. Le résultat est une pure merveille. Entre onirisme et tragédie, le film est fantastique en tout point de vue en reprenant à merveille toute la force des contes. On ne sait jamais si l'histoire va bien se terminer ou pas par un parfait équilibre entre la beauté et la cruauté. Tout est mené avec parcimonie et grâce pendant plus de deux heures de spectacle émotionnel intense. Le scénario développe des thèmes sentimentaux et moraux universels dès le départ et éveille en nous l'émotion la plus viscérale et touchante qui soit. L'histoire brasse autour de cette princesse une multitude de thèmes magnifiques sur la nature, l'espoir, la société, la condition de l'Homme, la jeunesse, la vieillesse, la religion jusqu'au conflit entre le destin que l'on nous (ou on) se fait et la liberté. On y retrouve une longue liste qu'il serait difficile de tout énumérer. Une sorte de passionnante encyclopédie hypnotique et fascinante absolument pas moralisatrice sur la vie. On observe tout en émerveillement entre autre la magie de la nature opposée à la noirceur de l'homme, la liberté sauvage avec le conformisme, la recherche du bonheur d'autrui qui condamne le sien, le courage et la lâcheté, la bienveillance et l'aveuglement, la beauté et l'artifice destructeur, l'authenticité et la falsification... et bien entendu la joie et le(s) regret(s).

A l'image des dessins en aquarelles somptueux, les thèmes sont traités de manière détaillée aussi subtiles qu'abstraites qui laissent à penser et réfléchir tout en nous transportant dans un rêve. Plongé dans une époustouflante beauté visuelle et auditive, nous sommes tour à tour embarqué donc à la fois dans un rêve et un cauchemar éveillé, aussi envoûtant que poétique. Nous sommes hypnotisés par un cinéaste qui possède la maîtrise, l'intelligence et la force de tous les ingrédients que le cinéma puisse lui et nous offrir. Un spectacle total. Que ce soit dans la simplicité et la vivacité des dialogues, les personnages merveilleux et attachants, la musique et le montage merveilleusement enchanteurs : tout est d'une autre dimension. Une dimension d'un conte qui vient un peu de l'au delà, pour ne pas trop en dire. Le graphisme suit plus particulièrement une fois l'humeur de la princesse sur une sublime scène de fuite (séquence merveilleuse) où les dessins virent au croquis, aux esquisses au fusain. Une merveilleuse et marquante scène qui est une démonstration du pouvoir du film d'animation. Dans ce film rien est superficiel, tous les plans sont pesés travaillés et sont là pour dégager une émotion, un message dans un crescendo parfait. Tous les tons et différents thèmes s'équilibrent merveilleusement les uns les autres donnant une atmosphère onirique légère et grave à la fois, faisant ressortir par petite touche les sentiments. Le conte de la princesse Kaguya est un spectacle rare tant il est riche et maîtrisé. Loin de ce que l'on peut voir d'habitude, la technique n'est pas hasardeuse, elle est au service de l'histoire et des émotions, une leçon magistrale. Absolument rien est artificiel, tout est d'une fulgurante beauté et pureté qui ne tombe jamais dans la prétention, le cliché et le déjà vu. Rien est tape à l'œil, rien est alourdit, rien est téléphoné, on est clairement transporté dans le conte. Avec ce formidable sens de la répartie, la mise en scène est d'une beauté absolue rappelant la force onirique des films de Lubitsch, la pureté du cinéma de Chaplin et le film d'animation japonais dans sa plus grande réussite.


Le conte de la princesse Kaguya représente la quintessence de la force du septième art, il est d'une beauté et d'une force émotionnelle rarement obtenue. Les mots ne sont pas suffisant pour décrire l'ampleur d'un tel travail, d'une telle maîtrise tant il est rare de voir une animation aussi réussie et intelligente dans le fond comme dans la forme. Meilleur que Le Tombeau des Lucioles, le dernier film de Takahata atteint la perfection du pur chef d'œuvre qui logiquement deviendra un classique du cinéma.  

Note : 10 / 10

La dévédéthèque parfaite

Les enfants loups, Ame et Yuki de Mamoru Hosoda, Le tombeau des lucioles d'Isao Takahata, Ernest et Célestine de Benjamin Renner, Vincent Patar et Stéphane Aubier. 

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