samedi 6 décembre 2014

White God



Réalisation et scénario : Kornel Mandruczo.
Durée : 1 h 55
Interprétation : Zsofia Psotta, Sandor Zsoter...
Genre : Coup de poing

Synopsis :

Pour favoriser les chiens de race, le gouvernement inflige à la population une lourde taxe sur les bâtards. Les propiétaires s'en debarassent, les refuges sont surpeuplés. Lili, 13 ans, adore son chien Hagen. Confiés tous les deux à son père biologique après le départ de sa mère, ce dernier l'abandonne refusant de payer la taxe. Alors que Lili le cherche dans toute la ville, Hagen, livré à lui même découvre la cruauté de l'Etre Humain. Hagen forme alors une meute et se venge sur les hommes.

Assurément l'un des films les plus forts de cette année justement primé à Cannes dans la catégorie « Un certain regard ». C'est effectivement la force de ce film, le regard d'un cinéaste sur son pays, La Hongrie, mais qui peut-être également valable de manière internationale. White God fait directement référence au fabuleux film de Samuel Fuller White Dog (d'ailleurs ressorti en salles cette année) et il en a également un fond et un discours tout aussi réaliste, juste et intelligent.

Ce film est absolument terrifiant et cela dès sa formidable séquence d'introduction qui par son authenticité et son réalisme absolu balaye tout ce que l'on a pu voir dans les films horrifiques jusqu'à aujourd'hui. La mise en scène frappe très fort dès le départ. Le scénario propose ensuite une double intrigue entre Lili une jeune fille de treize ans (Zsofia Psotta est une révélation) et celle de son chien Hagen séparé par un gouvernement totalitaire. Les deux personnages ont un parcours avec des hauts et des bas, remplis de faux espoirs pour finir par se retrouver à la toute fin métamorphosé à leur manière. Un Disney Fullerisé si on veut. Traité de manière simple dans la forme et ambiguë dans le fond, le scénario est formidable dans les pistes qu'il propose à son spectateur. Cette parabole du totalitarisme est pertinente et efficace avec une hiérarchie qui donne froid dans le dos. Tous le monde a un supérieur sur son dos ainsi que des obligations qui lui enlèvent toute moralité. C'est avec une très grande organisation de ses différents thèmes que le script laisse également à se poser pas mal de questions sur l'avenir de l'Homme, des animaux, de la société, la sur population, la politique, la crise et les mesures prises en général mais surtout la peinture d'une société qui devient de plus en plus discriminatoire entre les classes. Un peu comme l'an dernier dans le fabuleux Snowpiercer de Bong Joon-Ho, le film est d'une grand richesse en tout point et d'autres visionnages s'imposent pour y déceler l'audace et la grandeur, la portée du fond de ce film que le cinéaste soulève avec l'art et la manière. De plus White God ne souffrira jamais du temps car il ne possède pas d'effets spéciaux ainsi qu'une sobriété particulièrement remarquable dans son esthétique.

Sur un rythme général mené sans temps morts, une superbe photographie, une impressionnante bande originale, le cinéaste s'avère être au diapason techniquement pour faire monter la tension ainsi que développer ses différents discours pendant les trois quart de son film. Le cinéaste maîtrise par la suite de manière bien plus incisive et frappante son merveilleux montage dans les trois derniers quart d'heure absolument grandiose et menée avec une rare virtuosité. Avec un peu de gore, il revisite le genre horrifique avec une implacable fraîcheur et fougue qui revigorerai un zombie. On peut effectivement penser à un remake canin de Spartacus mais également de La planète des singes avec une toile de fond de film d'anticipation plutôt intrigante et d'actualité, un peu comme Fahrenheit 451. Ce brillant et savoureux pot pourri fait directement au White Dog de Samuel Fuller. En plus de son message similaire mettant le doigt sur l'influence de l'Homme sur l'animal on retrouve également la violence et le pessimisme de la race humaine de manière générale. White God propose plus de sujets de manière générale que le film de Fuller mais développe moins celle du racisme et laisse à la fin la réflexion au spectateur sur toutes ces dernières.

Le film de Mandruzco oscille entre horreur, drame, émotion, thriller et psychologie durant une bonne heure au point de se demander où l'on va. On suit donc le parcours de Lili dans les tourments de l'adolescence et la descente aux enfers de Hagen. Une fois que les deux parcours finissent de presque se croiser dans une courte parenthèse de sérénité, le film se transforme rapidement en un formidable film d'horreur où tous les thèmes se rejoignent avec beauté, émotions et intelligence avec la musique comme trait d'union entre l'homme et l'animal. Le magistral dernier plan est à la fois sublime, cruel et pousse à la réflexion, à l'image de ce film sublime.

White God est un film d'horreur très intelligent et unique. C'est aussi une de ses nombreuses qualités de ne pas être purement social comme souvent dans le cinéma d'auteur. J'encourage fortement ce genre de démarche. Un ovni qui remue et prend aux tripes. Si le tout n'est peut-être pas parfait c'est du cinéma bien trop rare, si intelligent et si impressionnant que ce véritable coup de poing mérite toutes les louanges et du succès en salles obscures. Je recommande donc très fortement ce film tant qu'il passe en salles car évidemment il est bien trop peu distribué.


Note : 9,5 / 10

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