jeudi 6 novembre 2014

Fury



Réalisation et scénario : David Ayer
Durée : 2 h 10
Interprétation : Brad Pitt, Logan Lerman, Shia LaBeouf, Michael Pena...
Genre : Brad, ce héros.

Synopsis :
L'épopée de quatre hommes à bord d'un tank Sherman nommé « Fury » dans les dernières heures du nazisme.

Rien à voir avec le film de Fritz Lang ou de Brian de Palma portant le même titre, Fury est un film de guerre signé David Ayer, un cinéaste prolifique à suivre. Fury a un concept plutôt minimaliste, celui de suivre un char et de son équipe de soldats américains, usés et fatigués dans les dernières heures de la Guerre. Le film possède des qualités comme celle d'avoir une vérité historique peu montrée au cinéma sur les dernières heures du nazisme ainsi que des portraits de soldats déshumanisés par la Guerre. Cependant le scénario n'est pas au rendez vous au niveau de la crédibilité psychologique et des portraits pas assez fouillés de ses différents personnages tous un peu trop caricaturaux. On regrettera un final aseptisé et décevant. De plus le film souffre aussi l'interprétation à demie teinte de Brad Pitt (il a du mal à faire passer ses tourments) et de statut de producteur qui ombrage pas mal de crédibilité.

Tout commençait pourtant bien avec une mise en scène d'une sobriété, d'une solidité remarquable et rare dans le genre. Le cinéaste utilise une technique brillante et créé une atmosphère de tension particulièrement réussie que ce soit dans l'ambiance lourde de la mort, de la guerre, du deuil comme celles des oppositions des personnages principaux. L'utilisation non abusive de la musique, des acteurs qui jouent juste même si leur rôle est un peu caricatural offre un résultat plutôt intéressant. Bien sûr si le public s'immerge un peu facilement auprès de Norman (Logan Lerman, très pro) un jeune soldat tout fraîchement recruté face aux vieux loups de terre (ou de Guerre) soit Michael Pena, Shia LaBeouf, Jon Bernthal et bien sûr Brad Pitt. Au début l'opposition remplit toutes ses promesses, on a droit a un des passages âpres, durs et denses. Seulement sachant que le film se déroule sur seulement vingt quatre heures, il paraît invraisemblable que ce jeune Norman devienne un sanguinaire à ce point la en si peu de temps. C'est simplement une grosse erreur de scénario.

Il y a deux grands morceaux de bravoures dans le travail de David Ayer. La première est une scène dans un appartement allemand qui paraît interminable mais qui dégage une grande intensité, une grande imagerie, une psychologique particulièrement réussie. L'écriture excelle, les personnages sortent de leurs caricatures pour la seule fois du film faisant ressortir tout le fond du film de manière viscérale et palpitante. Brad Pitt sera à son meilleur en homme aussi charismatique qu'énigmatique. Shia LaBeouf est le plus surprenant dans ce film. Le deuxième morceaux de bravoure est plus formel. Il sagit d'une scène d'action remarquable entre un char Allemand et trois américains dont le fameux Fury. La mise en scène monte en fusion et éclate en offrant au public un réalisme et un suspense redoutable. Un très grand moment.

Avec l'introduction du film soignée et ces deux scènes donc, on a fait hélas le tour du film. Car le reste est incohérent surtout avec la psychologie de Norman qui passe en vitesse lumière de l'agneau au guerrier sans peur et sans reproches. Le film finit plus vers un sentimentalisme, un patriotisme, agréablement en sourdine au départ, de manière inutile et désarmante. Le combat final est une grosse déception, une fin typiquement américaine qui ne dessert même pas ce qu'il y avait de plus passionnant dans ce film, la déshumanisation des soldats. Un château de cartes à moitié construit qui s'écroule en quelque sorte. Norman retrouve son double dans le camps allemands qui lui épargne la vie. Aucune imagerie soudoyée du « héros » et aucune ambiguïté entre les deux camps, on a eu une image des allemands encore une fois complètement débile à se jeter sous les mitrailleuses comme des poulets devant du grain de plomb. Le pire restant la production Brad Pitt à ne pas esquinter le beau gosse. Après des actes héroïques dignes d'une série Z (Brad Pitt doit zigouiller des centaines de nazis sur le char), deux grenades sur lui mourant et seulement deux éraflures sur la joue. Même mort il est trop invincible ce Brad. Il devrait jouer plutôt un film de super-héros pour être crédible.

Fury montre des faits historiques peu montrés au cinéma comme les allemands qui n'avaient pas voulu aller se battre retrouvés pendus avec un écriteau expliquant la raison de leur mort aux entrées des villes. Il y a donc des bonnes choses mais pas assez hélas. Si vous voulez voir un film qui traite aussi bien le côté humain côté allemand que américain je vous recommande plutôt de voir ou revoir Croix de fer de Sam Peckinpah. Fury change un peu de la plupart des films de guerre par son fond, mais rejoint quand même formellement ce que nous avons l'habitude de voir dans le genre depuis sa remise au goût du jour par Il faut sauver le soldat Ryan. A croire que Steven Spielberg a posé toutes les bases du film de guerre depuis quinze ans. Cinéaste et spectateur prenez aussi le penchant Polanski (Le pianiste) ou Loach (Le vent se lève) plus souvent. C'est tellement plus subtil et réaliste que des films de combats. Fury possède donc plein de bonnes intentions avec un peu de réussite, un peu de fond, mais ça ne suffit pas pour en faire un bon film.


Note : 5 / 10

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