samedi 6 septembre 2014

Kaboom





Réalisation et scénario : Gregg Araki.
Durée : 1 h 25
Distribution : Juno Temple, Thomas Dekker, Roxane Mesquida...
Genre : Apocalypse ? Yes.

Synopsis :

Smith s'installe dans un campus et commence à prendre ses aises. Mais lorsqu'il ingère des space cookies à une fête, il est persuadé avoir assisté au meurtre de la fille rousse qui hante ses rêves. En cherchant la vérité il va découvrir une machination bien plus profonde qui va changer sa vie, et celle de l'humanité.

Sans atteindre la grâce et la perfection de Mysterious Skin (difficile en même temps), Kaboom est un Teen movie complètement déjanté qui fonctionne avant tout par un coup de coeur du spectateur. Ce dernier risque d'être autant agacé qu'ennuyé qu'au contraire séduit et dans le trip. J'ai adhéré.

Tout en gardant les thèmes d'adolescents qui lui sont chers, Gregg Araki, auteur une nouvelle fois du scénario, lance le spectateur sur plusieurs intrigues sans pour autant le perdre. Avec une atmosphère oppressante, stressante et mystérieuse directement pompée de chez Lynch (référence assumée de Lost Highway et Twin Peaks par le cinéaste), le scénario joue avec les codes du Teen Movie, de la comédie et du thriller paranormal pour en signer un exercice de style réjouissant. Araki alterne avec habileté le premier et le second degré pour en faire ressortir un patchwork savoureux rythmé d'humour, de suspense et surtout de dérision. Un peu comme chez Baz Lurhmann mais avec plus de goût, tous les clichés sont tellement grossis à l'écran que rapidement le côté parodique et édulcoré est une évidence pour le spectateur dès le départ. Ce qui permet au cinéaste d'emmener son public où il le souhaite et surtout quand il le veut. Pour notre plus grand plaisir ce brassage virtuose des genres nous tient en haleine du début à la fin. Rempli de culot et de non attendu et sans pour autant jamais faire de la provocation gratuite, le scénario est un exercice de style brillant, autant ambigu que décontracté. Un trip cinématographique écrit de façon très équilibré qui fonctionne au poil qui fait de Kaboom un bordel réjouissant.

L'image, extrêmement léchée et constamment sur éclairée comme une pub, apporte un côté clip et pop assez hallucinatoire en contrepoint total à la noirceur de certains faits de l'intrigue. Un peu comme si Lost highway ou Donnie Darko étaient retournés avec l'équipe de la publicité de l'invisible de Dim. Écrit de cette manière on peut penser que ce serait digne d'un délire des Nuls, mais le cinéaste reste quand même même plus subtil car il mène un fabuleux et respectueux hommage au thriller Lynchéen en toile de fond. Même si dans le genre du cliché distorsion, il est parfois tout aussi vachard que la troupe d'Alain Chabat. Tout du long nous suivons un réalisateur qui a un sens de l'humour aussi aiguisé que délirant sur l'apocalypse, la fin du Monde. Sans doute l'ensemble sous emprise de drogue. Incorrigible, incorruptible et intraitable niveau montage, le réalisateur californien flirte avec le cinéma intelligent, provocateur et la série B pure. Un peu comme Tarantino avec toute sa culture cinématographique, Araki fait de même avec le cinéma de David Lynch, Richard Kelly, Alejandro Amenabar ou encore de Steven Soderbergh. Sans jamais entrer dans le piège des caricatures (et) de son scénario, le cinéaste nous emmène dans une originalité et un rythme effréné. Un pot pourri d'une heure vingt de cinéma d'auteur, indépendant, du thriller sérieux et de série B avec parfois une petite allure de bande dessinée. Le tout saupoudré d'un je m'en foutisme réjouissant qui atteint sa minute de gloire dans la dernière scène du film. Culte pour les amateurs.

Comment réceptionner Kaboom ? Je dirai comme un film indépendant sans règles, sans limites, avec de l'humour et une âme d'adolescent (drogué) toujours hanté sur la sexualité la fatalité et le sens de sa vie. Tout ces thèmes abordés auparavant chez le cinéaste sont esquissés ici de manière brève et plus grand public que Nowhere. Kaboom est tout simplement le genre de film dont rêve tout cinéaste : une carte blanche qui transpire un atypisme certain, de la provocation, en hommage à ses œuvres références et le tout avec un style bien personnel.

Le trip que Terry Gilliam n'avait pas réussi à tenir avec Las Vegas Parano malgré ses deux excellents acteurs, Araki le réussit ici sans prétention avec des jeunes acteurs en grande forme. Kaboom est donc un trip bien ficelé pour le veinard qui prend un plaisir communicatif avec le réalisateur de Mysterious skin. Puis un film avec un ton d'auteur et psychédélique du type des années soixante dix au cinéma est si rare de nos jours qu'il serai dommage de ne pas y jeter un coup d'œil. Pour le meilleur ou pour le pire, Kaboom est un film qui reste en tête, et c'est tout à son honneur.

Note : 9 /10

La dévédethèque parfaite

Lost Highway de David Lynch, Mysterious Skin de Gregg Araki, En Quatrième vitesse de Robert Aldrich et The Wicker Man de Robin Hardy. 

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