dimanche 6 mai 2018

L'île aux chiens (Isle Of Dogs)




J'avoue qu'à la sortie de The Grand Budapest Hotel, Wes Anderson m'avait laissé plutôt indifférent. Le cinéaste signait une belle synthèse de son style, de son cinéma en live avec un casting (une nouvelle fois) hallucinant mais finalement je trouvais qu'il manquait un peu de fraîcheur et d'originalité. Une sorte patchwork bien fait de son cinéma.


L'île aux chiens confirme ce que j'aime le plus dans le cinéma de Wes Anderson, soit sa minutie du détail et de sa mise en scène qui colle parfaitement au concept du film d'animation. Je trouve que le style du cinéaste, si symétrique, si calculé et ponctué de toutes sortes de ruptures, est bien plus approprié lorsqu'il adapte un scénario à la concision et la rigueur que l'on exige avec le cinéma d'animation. Avec Fantastic Mr Fox le cinéaste avait su puiser l'esprit de Roald Dahl, le côté conte enfantin et le mêler à son style pop et fun bien à lui. Cette fois avec L'île aux chiens le cinéaste change de registre et ne se contente pas de répéter ce qu'il sait faire. Il nous offre sur un plateau d'argent son film au fond le plus politique et formellement le plus risqué jusqu'à aujourd'hui. Un mélange d'animation, des langues, des styles, des animaux et des humains qui s'avère être un brillant exercice de style, une véritable réussite car on a droit à un cinéaste au sommet de sa maîtrise, émaillant l'ensemble d'un somptueux hommage au cinéma japonais (notamment de Kurosawa).

Dans cette dystopie, on ne peut que savourer et ressentir à la fois sans cesse des échos sur ce qu'il se passe dans le monde aujourd'hui. Le film est d'ailleurs extrêmement riche et mérite plusieurs visionnages pour tous les saisir, qualité d'un grand film. Plus destiné aux adultes, le message reste cependant très universel et singulier. L'île aux chiens fera date dans l'histoire du cinéma pour bien des raisons. La première parce que c'est tout simplement un excellent film. Ensuite parce qu'il parle très bien de notre époque actuelle. Il sera sans doute un film phare et représentatif des années 2015 / 2020. Puis c'est le premier film qui mélange ces multiples concepts d'animations. 

Une nouvelle fois le casting de voix est à tomber par terre, apportant un charme et un charisme à l'ensemble aussi délicieux qu'on fondant au chocolat sortant du four. La bande son musicale d'Alexandre Desplat est également une pure réussite, elle est peut-être au même niveau que le talent de Wes Anderson, donnant un corps incroyable à l'ensemble du film. On peut reprocher un petit manque d'émotion et même d'approfondissement sur certains personnages et pistes narratives. Cependant il est toujours plaisant de voir le cinéaste, sans prétention, s'aventurer dans le fond de son univers et de son cinéma si particulier et souvent assez cloisonné. Wes Anderson tend enfin un miroir sur le monde dans cette aventure palpitante, originale et inédite et il évite pas mal de facilités pour s'aventurer dans la noirceur et le brûlot. Parfois on serait presque chez Wes Andersen....  et je trouve ça vraiment génial. 

Réalisation : Wes Anderson
Scénario : Roman Coppola, Jason Schwartzman, Kunichi Nomura et Wes Anderson. 
Durée : 1 h 40 
Avec les voix de : Bryan Cranston, Edward Norton, Frances McDormand, Liev Schreiber, Jeff Goldblum, Bill Murray... 

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