vendredi 31 juillet 2015

La Dame dans l'Auto avec des Lunettes et un Fusil ( Lady in the Car with Glasses and a Gun )



Réalisation : Anatole Litvak
Scénario : Sébastien Japrisot et Anatole Litvak
d'après le roman de Sébastien Japrisot
Durée : 1 h 35
Interprétation : Samantha Eggar, Oliver Reed, Stephane Audran, Yves Pignot...
Genre : Polar sixties

Synopsis :

Après avoir conduit son patron à l'aéroport d'Orly, sa secrétaire Danny doit ramener la voiture à Paris. Elle se trompe de route et finalement décide de partir pour le sud voir la mer. Elle ignore qu'il y a un cadavre dans le coffre.

Le dernier film du grand Anatole Litvak est hélas introuvable sur tout support. Dommage car c'est une très bonne adaptation d'un excellent livre de Sébastien Japrisot réputé inadaptable à l'écran. Litvak a eu l'intelligence de prendre l'auteur pour écrire le scénario avec lui et s'en tire avec les honneurs. Le livre a la particularité et la force d'être composé de quatre parties différentes, soit quatre points de vues qui se recoupent les uns les autres et finissent par donner un sens à une intrigue palpitante et au trouble magistral.

On retrouve dans le livre les parties de « La dame » de « l'auto » des « lunettes » et ensuite du « fusil » dans ce film distrayant et libre comme l'air. Dans un concept qui aurait séduit Innaritu, Anatole Litvak négocie parfaitement la trame du roman en insufflant le côté naïf des années soixante avec l'originalité et le trouble du roman du début à la fin. Avec un jeu d'acteur inspiré, une mise en scène simple et un montage agréablement aéré La dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil est un produit purement sixties dans tous les bons sens du terme. On y retrouve le ton naïf et libre de cette époque que ce soit dans les mœurs ou cinématographiquement tous le monde y trouve son compte.

Sur une belle bande son de Michel Legrand et Petula Clark, ce road movie policier très original se comporte dans un premier temps comme un film noir. C'est à dire que pendant la moitié du film, on ne comprend strictement rien du tout. En effet très peu d'indices, voir aucuns ne nous sont glissés et nous sommes complètement manipulés comme le personnage principal. Du trouble s'installe même parfois dans cette ballade au suspense de plus en plus grandissant. Le cinéaste depuis Raccrochez c'est une erreur est habitué de réaliser ce genre de suspense haletant et original dans un genre souvent fermé par les conventions. Le roman entretient le trouble jusqu'à la dernière partie qui est un coup de fouet magistral dans le genre du policier et de la littérature. Le film lui est plus soft mais on palpe tout de même la manipulation de manière assez jouissive sur la dernière partie. On se retrouve dans un divertissement où l'originalité et l'habileté du scénario et de la mise en scène donnent au film une fraîcheur et une qualité toujours authentique et atypique de nos jours. On est bien loin de pas mal de policiers de cette époque. 

Interprété par Samantha Eggar et Oliver Reed (qui se retrouveront ensemble plus tard chez David Cronenberg dans Chromosome III), on ressent la production franco-américaine du film par un casting pas toujours irréprochable. Voilà ce qui pêche un peu niveau crédibilité dans le film, on parle tous trop bien l'anglais en France ce qui est évidemment faux. Même aujourd'hui ce n'est toujours pas aussi bien le cas. Heureusement le cinéaste à l'habitude de jouer sur les différentes langues depuis son retour en Europe d'Hollywood. D'ailleurs La nuit des généraux était un grande production dont le français, l'anglais et l'allemand se croisaient avec beaucoup d'aise et de justesse. Ici tout ne paraît pas toujours crédible mais l'intrigue et les dialogues sont si bons et si judicieusement placés qu'on prend malgré cela un grand plaisir à suivre ce très bon film.

Si le film est moins bon que le livre de Sébastien Japrisot (en même temps c'est dur de l'égaler) ce film reste quand même un très bon moment. Le road movie et le policier sont des genres souvent vite enfermés par leurs codes, ce qui n'est pas le cas ici. Ici les codes sont habilement travaillés et même repoussés. Même si au final cela ne va pas aussi loin que le roman et n'en garde pas le même tour de force. A travers cette bonne adaptation, on retrouve un témoignage de l'époque libre des années soixante rarement si bien transposé au l'écran à l'époque et toujours l'heure actuelle. Ce dernier film d'Anatole Litvak est à découvrir, à comparer à la nouvelle version que Joan Sfar nous propose cet été 2015. Vivement une réédition de ce film ainsi qu'une plus grande reconnaissance du talent d'Anatole Litvak. Pour son dernier film il signe un film un peu à l'image de son talent à l'époque : toujours dans l'air du temps, avec une longueur d'avance et une fraîcheur narrative, visuelle toujours époustouflante. 

Note : 8 / 10


PS : Je recommande la lecture du livre La Dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil de Sébastien Japrisot qui est un excellent polar où l'on ne s'ennuie jamais et qui possède toutes les qualités ddu genre et d'une grand oeuvre littéraire. Ce qui n'est pas commun. 

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