lundi 5 janvier 2015

A Most Violent Year



Réalisation et scénario : J.C Chandlor
Durée : 2 h
Interprétation : Oscar Isaac, Jessica Chastain, Albert Brooks...
Genre : Quelques nuances de (James) Gray

Synopsis :

En 1981 à New York, le marché du pétrole se heurte à la corruption. Comment continuer son business honnêtement dans la violence galopante et la dépravation de l'époque ? Abel Morales tente de diriger son marché et garder les banquiers de son côté tout en restant dans la loi.

Après un huis clos dans le domaine de la finance et une ballade avec un vieux loup du cinéma en mer, le cinéaste prometteur J.C Chandlor se lance dans le film noir. A most violent Year possède une remarquable reconstitution, un classicisme et une mise en scène digne d'un grand Lumet, Scorsese ou encore Coppola ainsi qu'une beauté formelle proche d'un classique du cinéma. Rien que ça oui ! Seulement l'impression que le film est constamment réalisé au ralenti et ne soulève finalement que de trop brèves intrigues se fait vite ressentir, le temps est long et au final sauf une énième peinture grise du système américain, le film n'est pas du tout captivant.

La qualité ainsi que la grandeur de la mise en scène du cinéaste sont bien présentes. C'est certainement le meilleur savoir faire dans le genre que l'on puisse voir et fait directement penser au cinéma James Gray. Seulement le seul autre point commun entre James Gray et J.C Chandor sera d'avoir du goût pour les très bonnes références dans le genre. Chandor n'a étonnamment pas de ton, ni de personnalité et une intrigue qui reste collée au sol et qui ne décollera jamais. L'impression de regarder un classique du cinéma dénué de suspense, d'innovation et surtout, et c'est le plus grave, de ton. Tout tourne au ralenti et on voit tous les rouages d'une mécanique pas infernale du tout tourner de manière pépère et uniforme. Comme si l'on mettait des films comme La nuit nous appartient ou The Yard à seize images secondes et qu'on le visionne. Un peu comme si l'on plaçait le film sur un banc de contrôle technique et l'on voyait tout le millimétrisme du cinéaste l'un après l'autre, tour à tour. Alors certes les ficelles sont dignes des plus grands réalisateurs techniquement mais tout, y compris l'écriture, manque de cruellement de souffle.

Même si les acteurs sont tous bons, avec un tel casting aussi y a pas de risques, ils jouent eux aussi au ralenti et on voit sur leur visage le travail expressif et geste totalement calculés, à l'image de la technique. A Most violent Year fait deux très longues heures sous la direction de Chandor, il aurait fait une heure trente sous James Gray et Francis Ford Coppola et une heure sous Scorsese. Temps auquel le scénario aurait pu plus développer des personnages secondaires étonnamment transparents et sous exploités pour le genre. Le scénario se contente de dépeindre faiblement le désenchantement de l'Amérique un peu sur le même tableau que Margin Call. Seulement son premier film avait un scénario plus rythmé et plus solide même s'il était loin de Robert Altman et Sidney Lumet encore une fois. Ici les références fusent mais absolument tout, y compris le couple principal au centre du film, reste superficiel et finalement trop pauvre pour savourer quelque chose autre que l'ennui. Le cinéaste et scénariste ne pose que trop peu de questions à son spectateur, il l'aveugle avec son travail d'orfèvre dénué de niaque.

Pourtant toutes les questions et les thèmes sont toujours d'actualités et je comprend l’intérêt et la démarche du film. On trouve une peinture sur la lutte commerciale, le partage du bien et du mal sur les procédés de travailler dans une société en crise et de plus en plus violente et bien entendu la difficulté d'avoir son identité propre aux Etats-Unis quand on est immigré. Plein de questions toujours d'actualités, vues et traitées multiples fois. Le scénario est paresseux à l'image du film, d'une platitude totale par rapport à son ambition. On retrouve deux scènes d'actions, une piquée dans French Connection de William Friedkin, la suivante dans L'impasse de Brian de Palma et elles paraissent uniquement mouvementées car le reste du film n'est que du chloroforme sur pellicule. La mise en scène manque de puissance, de magnétisme, de cachet et tourne souvent à vide, un peu comme l'a été Paul Thomas Anderson avec The Master. Dénué de cynisme et d'originalité, tout est frustrant. 

Pour celui qui rentre dans ce (faux) classique du polar new yorkais particulièrement plat et soporifique et y trouve son bonheur tant mieux. Pour ma part Chandor finalement n'a pas grand chose à dire de plus sauf que c'est un très bon cinéaste dans le classicisme. Il est quelque part niché entre Paul Thomas Anderson et James Gray mais avec un millimétrisme proche de Christopher Nolan qui n'est pas du tout le bienvenu pour ce genre de film. Son film ne manque surtout pas de références loin de là, mais il manque d'âme, d'innovation, de mordant et surtout de personnalité. Une très grande déception pour ma part.


Note : 3,5 /10

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