lundi 29 décembre 2014

Whiplash




Réalisation et scénario : Damien Chazelle
Durée : 1 h 45
Interprétation : Miles Teller, J.K Simmons, Paul Reiser...
Genre : Rocky fait de la zick chez Kubrick

Synopsis :

Andrew, 19 ans, a pour objectif de devenir un des meilleurs batteurs de Jazz. Il entre dans une école prestigieuse où la concurrence est rude, surtout sous la direction du professeur Fletcher, qui a des méthodes tyranniques. 

Avec Whiplash, on pense à un Rocky dans le domaine de la musique où plane du début à la fin la force de la première partie du film de Kubrick Full Metal Jacket. Le cinéaste réussit avec une formidable mise en scène et deux acteurs époustouflants à tenir la tension et l'ambiguïté jusqu'au coup de cymbale final.

Je dirais qu'il n'était pas trop tôt de retrouver l'excellent J.K Simmons dans un rôle important. Et quel rôle ! Il retrouve un personnage presque aussi terrifiant que dans la série OZ qui lui a donné une véritable notoriété. En face de ce monstre le jeune Miles Teller a le talent de répondre présent tout en sobriété et avec une aisance particulièrement bluffante. Ces deux personnages sont le moteur principal du film. Autour d'eux le cinéaste avec un montage sans failles arrive a créer plusieurs morceaux de bravoures collés les uns aux autres. Sans temps morts, le scénario très simple possède une ambiguïté permanente quant à la philosophie du professeur Fletcher de pousser à bout les gens pour en tirer le meilleur. Dommage que tout ne soit pas uniquement concentré uniquement là dessus car les autres pistes abordées ne sont pas aussi réussies et paraissent un peu vaines. Cette relation entre l'élève et son professeur dégage un sadisme aussi virevoltant qu'ambigu qui fait toute l'originalité et force de ce film.

Heureusement ces petites touches classiques sont assez brèves et nous permettent de faire quelques pauses permettant de mettre en valeur les scènes de batterie qui sont tout bonnement géniales. Filmé comme un combat épique de gladiateurs, les coups remplacés par des notes, on passe de la transpiration par du sang, les coulisses de cet univers est particulièrement saisissant et très bien rendu à l'écran. Le montage est parfait comme un film de Fincher. On notera en plus une superbe photographie donnant un cachet supplémentaire à ce grand film. La mise en scène bouge sans cesse dans un tempo lui aussi musical, les mouvements ainsi que le choix du découpage des plans sont très vivants et particulièrement soufflants. En gros ça déménage dans tous les duels, toutes les tensions et les épreuves qui font naître les conflits. Ensuite les petites parenthèses psychologiques et émotionnelles sont peut être trop classiques à côté pour faire de Whiplash un coup de poing absolument magistral. Ces petites touches restent tout de même suffisamment sobres pour ne pas casser le rythme et le ton du film. C'est le plus important.

Le cinéaste capte merveilleusement les silences, la force des tensions psychologiques ainsi que l'acharnement d'un artiste pour être reconnu dans son milieu pour mieux faire ressentir au spectateur la place d'Andrew. De très bons dialogues désamorcent ce qui formellement aurait pu être pure terreur. Le côté clinique un peu lisse qui aurait pu s'installer de manière bien plus percutante dès le départ mais le cinéaste préfère vite garder la violence en toile de fond et mettre en avant la relation impalpable entre Andrew et le professeur jusqu'à sa fin ouverte. Côté mise en scène on peut penser au classicisme et à l'efficacité de Sidney Lumet en très grande forme. Sachant que ce n'est que son second film, c'est plus que prometteur et ce sera dur d'assurer la tournant pour lui. La violence est donc palpable dans le fond du film mais le scénario ne cherche pas à la faire exploser comme la plupart des films. La grande originalité de ce film est de faire monter la violence par petites touches dans la forme, avec les exploits physiques et son montage. A défaut d'être cisaillante, visionnaire et continuellement ample l'écriture est sobre et bien distillée ancrée dans un crescendo aussi régulier qu'un métronome. Exactement conçu comme un morceau de musique le script évite le machiavélisme facile ponctué habituellement de moments forts assez tape à l'oeil. La dernière scène est bien sûre la meilleure et laisse à penser à l'idéologie du professeur. On en ressort donc un peu avec une pointe d'amertume en bouche particulièrement plaisante et trop rare de nos jours.

Loin du magnifique Bird de Clint Eastwood ou d'Autour de Minuit de Bertrand Tavernier, vous n'êtes pas obligés d'être fan ou grand amateur de Jazz pour savourer ce dernier grand film de l'année 2014 qui vaut le déplacement en salles. Au contraire c'est plutôt accessible pour tous, simple et très efficace. Whiplash porte bien son nom, un "coup de fouet" qui en fait un des meilleurs films de l'année 2014. Une bien belle façon de clôturer cette riche année.

Note : 9,5 / 10


Aucun commentaire: