samedi 7 juin 2014

Her



Réalisation et scénario : Spike Jonze.
Durée : 2 h.
Distribution : Joaquin Phoenix, Amy Adams, Rooney Mara...
Genre : Vous êtes le Joaquin des hôtes cet Apple store...

Synopsis :

Los Angeles dans un futur proche. Théodore Twombly, un homme sensible au caractère complexe, est inconsolable suite à une rupture difficile. Il fait alors inquisition d'un programme informatique ultramoderne, capable de s'adapter à la personnalité de chaque utilisateur. En lançant le système il fait la connaissance de « Samantha », une voix féminine intelligente, intuitive et drôle. Les besoins et désirs de Samantha grandissent et évoluent, tout comme ceux de Théodore, et, peu à peu, tombent amoureux...

Autant le dire de suite, ce film est une déception. Si j'adore les deux premiers films de Spike Jonze c'est sans aucun doute parce que les scripts sont signés du tordu et génial Charlie Kaufman. Depuis le cinéaste avait pour la première fois rédigé le scénario avec Max et les Maximonstres, un trip imaginaire enfantin plutôt mignon aux grandes allures d'un immense clip. Her confirme que Spike Jonze est un peu comme Michel Gondry. En plus d'avoir tous les deux adaptés brillamment les scripts de Charlie Kaufman à l'écran ainsi que de venir du milieu du clip, ce sont deux très bons réalisateurs mais de piètres scénaristes. Her a reçu l'oscar du meilleur scénario original, nouvelle preuve que les oscars ne sont toujours pas objectifs et confirme l'aridité de la créativité de nos jours. Ce film mériterait plutôt l'oscar de la meilleure idée originale mais absolument pas celui du meilleur scénario original.

Pourtant le film commençait plutôt bien. Le scénario et la mise en scène soignée du cinéaste plonge le spectateur dans un futur proche qui touche le public frontalement. Il est en effet intéressant de voir la population (du futur vraiment ?) si dépendante à la technologie et paradoxalement perdre tout contact humain, tout sentiments les uns vers les autres et réfugier ses émotions dans la technologie. Théodore (Joaquin Phoenix) a pour travail le service d'écrire des lettres à la place des gens, un métier qui veut beaucoup de choses. Théodore est un genre de Cyrano de Bergerac dans l'ère de l'Iphone, un homme populaire, très sentimental, sensible mais bien seul comme beaucoup de gens dans cette société. Tout cela est plutôt prenant mais vite frustrant car le scénario n'ira pas plus loin.

Her ne se hisse ni dans la science-fiction et encore moins dans le film satyrique. Il est hélas dans le film sentimental tout ce qui a de plus classique. Ma plus grande frustration est de constater que le scénario n'emprunte que des chemins convenus, uniquement axés sur les sentiments du personnage, au final assez gnangnans et dénués d'originalités. On reste dans la norme du film sentimental avec un dénouement qui n'en est pas vraiment un étant donné qu'il se déroule dans la pure logique des événements. Quand la dispute (incontournable dans le genre) entre Théodore et Samantha arrive, j'espérais quelque chose de nouveau, de surprenant mais ce sera hélas pas le cas. Pendant ce temps, il est vrai que l'on a le temps de se pencher sur cette histoire d'amour. Si les thèmes abordés sur les relations, les sentiments, la complicité entre deux êtres (vivants et/ou virtuels ici) ainsi que tout ce qui peut graviter autour de la philosophie de l'amour sont nombreux, rien n'est développé et ne reste que gentiment abordé. Tout est encore plus mou après la première heure, la mayonnaise ne monte toujours pas a cause d'un lyrisme particulièrement en manque d'inspiration. Toutes les approches sont aussi sages et lisses que la mise en scène ultra stylisée du cinéaste, ce qui fait de Her un produit 100% Hipster.

Heureusement Joaquin Phoenix est un acteur formidable. Son talent permet de rendre le personnage de Théodore attachant jusqu'à la fin. Le casting qui l'entoure est propre mais aussi figé que l'intérêt de ce film. La psychologie et la direction des personnages sont guindés dans les conventions d'écritures du genre. Le cinéaste ne met jamais le doigt sur les bonnes questions hormis son idée de départ et ne déballe qu'un film sentimental au fond très mièvre. Her a mit son public et l'oscar dans la poche rien qu'avec l'ambition de son idée principale. Black Mirror, la série anglaise qui suscite beaucoup d'intérêt sur le pouvoir des écrans, possède un épisode qui ressemble un peu à cette idée mais avec un être disparu et la série n'est hélas pas pour autant reconnu. Spike Jonze déçoit donc par son impersonnalité. Cependant il reste cohérent bien sûr avec son histoire d'amour. L'histoire se termine bien, même si on la devine dès le début de la relation. Oui elle se termine bien et j'insiste, même si elle se veut triste. Elle serait bien plus réussie, plus critique et bien plus intelligente à mon goût si justement l'aventure, la relation continuait. (Spoiler) La fin est juste un retour très moralisateur à la réalité avec un dénouement paradoxalement heureux. (Fin du spoiler, si s'en était un). Le point de vue du cinéaste est une bluette, une fable toute nulle dans un sujet que des cinéastes plus engagés auraient certainement créés la polémique. Her ne risque pas de faire polémique car il a caressé tout le monde dans le sens du poil avec deux heures de balivernes frustrantes.

Dommage que toutes les promesses du début ne soient pas tenues. Spike Jonze n'est pas un aussi brillant scénariste que Charlie Kaufman mais s'avère aussi ici être un dialoguiste plutôt impersonnel et pas vraiment convaincant. Sans ses acteurs Her serait une véritable torture de deux heures dans cette longue conversation amoureuse d'Hipster pour le moins ennuyeuse. Her se range dans la catégorie du film sentimental avec une idée originale. On peut penser à l'oubliable Monique de Valérie Guignabodet avec le bon Dupontel ainsi que dans la même veine le très sympathique Une fiancée pas comme les autres de Craig Gillepsie où Ryan Gosling y est brillant. Seulement il ressemblerait au film I love You de Marco Ferreri avec Christophe Lambert. Remake ou hasard ? On s'en moque, Her est visible dans beaucoup de films sentimentaux, et souvent en plus distrayant.

Si Her se fond dans la masse des autres films du genre par sa prévisibilité, sa mièvrerie il possède un des meilleurs acteurs Hollywoodiens en tête d'affiche pour le rendre potable. Comme dirait notre Gégé national dans un de ses plus grands rôles : « C'est un peu court jeune homme ».


Note : 4 /20

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