jeudi 24 décembre 2015

Orange is the New Black



Créée par Jenji Kohan 
Tiré du livre de Piper Kerman Orange is the New Black : My year in a women's prison

Genre : Oz au féminin

Faire une série dans une prison n'est pas chose facile, surtout  de passer derrière Oz de Tom Fontana. Le défi est plutôt bien relevé, tout du moins sur les deux premières saisons. Le script est exactement sur la même base de la série de Tom Fontana  de manière plus adoucie. Les scénaristes ajoutent avec délicatesse une certaine dose d'humour et d'émotion dans l'univers carcéral très noir et violent que l'on a vu dans Oz. On retrouve un bon équilibre entre la comédie et le drame dans des péripéties plus ou moins palpitantes mais qui sont tout de même bien écrites. Si la saison 3 est bien faible, j'espère que la saison 4 saura relever le niveau et atteindre le niveau des deux premières.


Saison 1 :

Au début j'ai eu un peu de mal avec ce mélange pas toujours bien géré de bons sentiments et l'univers noir et impitoyable de la prison. Piper est exactement Tobias dans OZ, l'agneau qui doit se transformer en loup une fois dans la prison. Si la série est beaucoup plus douce, plus humaine qu'Oz elle se base exactement sur la même construction en modèle. On montre le passé du personnage suivit d'une intrigue de qui a le pouvoir sur qui et surtout comment. C'est assumé d'ailleurs quand une des personnages dit que ce n'est pas comme dans Oz. Le pilote est plutôt pas mal mais la suite est bien meilleure car le scénario développe très bien la tension et l'émotion et dresse une galerie de personnages nuancés des deux côtés des barreaux. 

Très référencée, la série ne croule pas dans les hommages et fait son chemin en étant généreuse en tout point pour son public. Les dialogues sont bons et les intrigues arrivent de manières plutôt habiles et naturellement. Tout n'est pas too much hormis cette histoire de couple qui n'est finalement pas intéressante. Le scénario est à côté suffisamment solide pour bien engager la saison 2. Cette saison 1 suit particulièrement le point de vue de Piper, cruche et intelligente à la fois tout en restant attachante. La prison est présentée comme l'antre de l'insécurité mais avec une vie sociale beaucoup soft, plus normale on va dire que dans le quartier de haute sécurité de la plupart des prisons. La violence physique est remplacée par la manipulation, tout ce qui a de plus féminin. On retrouve également un état des lieux plutôt intéressant sur les problèmes de budget dans les prisons, ainsi que l'engrenage du pouvoir et des responsabilités à toutes les échelles. Les conditions des prisonnières sont souvent montrées du doigt, victimes des économies et entourées d'hommes de garde et non de femmes. Comme Oz, la peinture est bien étalée et loin d'être too much. Elle est plutôt adroite et intéressante. 

Si la mise en scène n'est pas transcendante, elle est plutôt efficace, surtout quand c'est Jodie Foster qui s'y colle car son épisode est de loin le mieux réalisé et le plus rythmé. Très classique mais on retrouve une belle direction d'acteur, un équilibre réussi entre les vieux films de studios des années 50 et les séries modernes. Plutôt agréable à suivre, la sincérité prend le dessus des légers défauts. J'adhère. 

Saison 2 :

Après une première saison, les scénaristes nuancent beaucoup plus les personnages et je trouve que c'est un tour de force. La noirceur fait place à la description des personnages, ce qui rend la prison beaucoup plus chaleureuse au spectateur. On s'attache clairement aux personnages, qu'ils soient détestables ou attachants. On regrette toujours l'histoire d'amour qui se brise du côté de Piper et son fiancé. Ces deux personnages sont là que pour conforter Piper à retourner vers son ancienne compagne. 

Sinon, la narration est extrêmement habile et monte avec un superbe crescendo en suspense  pour arriver aux deux derniers épisodes au sommet de la virtuosité de la série. Bien que les scénaristes nous ont attendris légèrement l'ensemble des détenues et mis uniquement Vee en grande méchante, cette dernière est superbement traitée. C'est la garce manipulatrice par excellence. Véhiculée par des flash back efficaces et qui ne mangent pas trop le temps de l'épisode, la narration distille un très beau savoir faire qui fait plaisir à suivre. Oui on prend du plaisir à suivre ces histoires qui sont développées bien comme il faut contrairement à pas mal de série. Pas de frustrations, tout se décante au dernier épisode. 

La série prend le tournant de prendre aussi bien le parti de l'action que celui du sentimentalisme. C'est réussi car tout est subtil, très humain et jamais too much. Le scénario vise juste et les personnages sont tous bien dans leur rôle. L'interprétation est là pour donner un bon coup de pouce à ce défi, toutes ces actrices sont remarquables. Comme dans pas mal de séries, un bon gros nettoyage se fait à la fin mais tout est bien amené, de manière subtile, honnête et par moment jouissive. 

Une saison 2 dans la continuité de la première. Différente mais tout aussi brillante.

Saison 3

C'est une grande déception. Sans aucun fil conducteur, les scénaristes sont en grande panne d'inspiration et se reposent sur le quotidien des détenues la prison. Dans l'absolu, c'est osé, mais dans le fait c'est soporifique même si on prend plaisir à découvrir le passé des personnages. Tout est dénué de suspense, les intrigues ne sont pas très intéressantes et s'étendent sur des longs épisodes. Tout fonctionne au ralenti et rien

On suit poliment la série qui reste proche des personnages que l'on a suivi depuis le début. Tout est guindé, avec des péripéties qui ne sont pas aussi bien travaillées ni amenées que dans les précédentes saisons. Il y a eu du nettoyage chez des personnages importants, on s'ennuie de ce script qui veut trop rendre de la compassion chez toutes ces détenues. Rien que de voir ce qu'ils ont fait au personnage de  Doggett en est la preuve, elle est devenue extrémiste dangereuse en loque soumise sans personnalité du jour au lendemain. 

La série cherche aussi à rendre beaucoup plus antipathique Piper et ça ne fonctionne pas vraiment même si au dernier épisode son geste final le réussit. Petit surf (assumé) sur la mode de Breaking Bad. Bref, c'est du ratage pour ma part et j'espère que la saison quatre prendra la résolution de relancer des intrigues et une vraie essence narrative que nourrissaient agréablement les deux premières saisons. 

Saison 4 :

Les scénaristes se sont repris en main et marchent cette fois sur les pas des premières saisons exceptionnelles d'Oz. Sans pour autant copier, un souffle politique contemporaine s'ajoute pour ajouter une noirceur brillante et souvent palpitante. Les personnages deviennent tous attachants à leur manière, les événements sont amenés de manière audacieuse. On apprécie pas mal de subtilités. 

Cette saison offre ce qu'il y a de mieux jusqu'à maintenant dans la série avec une belle continuité. Du début à la fin elle monte en puissance pour terminer en émeute, le final est un suspense total. La série montre qu'elle peut proposer autre chose que les deux premières saisons avec un point de vue beaucoup plus noir. 

Rythme et scénario aussi dense qu'intelligent, il serait dommage de s'arrêter après une saison 3 mollassonne car le meilleur est à suivre. 

Saison 5

Toute la saison se passe pendant l'émeute. C'est au final un mélange de la saison 3 et de la saison 4, un peu irrégulier mais prenant tout de même car les personnages et les intrigues sont bien travaillées. Pas vraiment de suspense mais les personnages sont les stars. Avec des dialogues très bien travaillés, on se laisse prendre au jeu à une saison récréation plutôt juste dans la manière dont se déroule les fait. 

Un souffle féministe se dégage du début à la fin hanté par le drame de la saison précédente. Les personnages se dévoilent, changent de camps ou se trouvent. Des fois les scénaristes ne savent pas trop quoi faire de certains personnages principaux (Piper). Il reste quand même pas mal d'humour et des clins d'oeil plutôt sympa. 

On attend la prochaine saison, espérant qu'elle soit du niveau de la saison 4. Malgré ses défauts, Orange Is A New Black reste une série contemporaine de qualité et essentielle. 

Note Saison 1 & 2 : 8 / 10  
Note Saison 3 : 4 / 10
Note Saison 4 : 9 / 10
Note Saison 5 : 7 / 10

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