Réalisation et scénario : Dan Gilroy
Durée : 1 h 55
Interprétation : Jake Gyllenhaal, Rene
Russo, Riz Ahmed, Bill Paxton...
Genre : Les hommes du JT matinal
Synopsis :
Branché sur les fréquences radios de
la police, Lou parcourt Los Angeles la nuit à la recherche d'images
sensationnelles qu'il vend aux chaînes locales à prix d'or. Lou
repousse les limites de plus en plus pour devenir le plus redoutable
et le seul à avoir la main sur sa spécialité...
Voilà enfin un polar qui a de la
gueule et à commencer par celle de Jake Gyllenhaal au sommet de son
art. Si l'acteur nous offre une composition digne de Christian Bale
dans The Machinist, tout comme ce dernier il ne porte pas le film car
tout est de qualité autour. Night Call s'impose d'emblée comme un
polar contemporain culte car il est particulièrement audacieux et
virtuose. Une peinture de la société actuelle des médias, du
public ainsi que les échelons du monde du travail et de la société au vitriol, un portait
psychologique impalpable et effrayant d'un obsessionnel qui
réactualise intelligemment les meilleurs personnages du genre (entre
La valse des pantins et Le Voyeur entre autre) le tout parsemé d'un
humour noir absolument régalant.
Tout commence en bas de l'échelle en
quelque sorte, Lou est un voleur et survit en vendant ce qu'il peut notamment du métal, chose particulièrement courante. Pour cela il
est prêt à tout même à faire du mal aux innocents. Dès le
départ, le personnage regard brillant, sourire de Joker aux lèvres qui met mal
à l'aise et opportuniste est planté comme le moteur de l'action.
C'est alors que lorsque Lou rentre chez lui il voit autour d'un
accident de voiture des hommes filmer une victime agoniser en train
de se faire extraire par deux policiers. Il a alors une révélation,
il décide de se lancer dans cette activité. Il se prend un associé
et continue toujours de se droguer d'internet obtenant vraiment ce
qu'il veut quand il le souhaite. Son machiavélisme prend une vitesse
de plus en plus effrayante et de plus en plus lourd jusqu'au final
d'un cynisme merveilleux et digne à l'âge d'or de la nouvelle vague
du cinéma américain des années soixante dix.
Dan Gilroy pour son premier film est
particulièrement adroit. Sa mise en scène au départ est un peu
instable et a du mal à suivre la teneur de son scénario. Seulement on s'aperçoit que c'est vraiment voulu ensuite car lorsque Lou dit ouvertement à Nina que
désormais il soigne le cadre dans ses dernières prises pour que sa
choc plus le public, ironiquement tout de suite le film est mieux cadré et
surtout mieux réalisé. A partir de là Night Call prend une
toute autre ampleur et gagne en cachet d'auteur et de suspense
fascinant. Le scénario est aussi abstrait dans la psychologie du
personnage effrayant de Lou, de sa manipulation qui devient de plus
en plus inhumaine et sans limite qu'il est démonstratif dans sa
dénonciation de montrer comment gagner sa vie ou faire tout
simplement son self made man actuellement.
Sous ses allures de thriller choquant
et parfaitement orchestré le scénario n'enfonce pas de portes ouvertes comme souvent dans les polars et reste toujours pertinent dans les différents thèmes
qu'il aborde. Dan Gilroy n'en fait jamais trop, il s'attache aux
émotions du public et à ses différents discours en offrant un portrait de
manière aussi classe qu'ambigu, malhonnête et dérangé d'un homme
qui réussit simplement sa vie actuellement. Il en profite aussi pour dresser celui de la société.
Vachard, cruel et acide mais tellement dans l'air du temps des ces
deux dernières décennies, voilà un polar indépendant qui
mérite son statut de film culte. Beaucoup moins psychique
et viscéral que Taxi driver de Martin Scorsese, Night
Call ne peut avoir qu'un obsessionnel au volant la nuit et le portait
d'une société à leur époque écrit et filmé de manière intemporelle en
commun. En obsessionnel, Gyllenhaal est un mélange efficace,
intriguant et surtout insaisissable d'un Rupert Pupkin (La Valse des
pantins) et de Mark Lewis (Le voyeur) deux chefs d’œuvres visionnaires et atypique dans le genre.
A la bande son on retrouve l'irrégulier James Newton Howard. Sa bande originale amène une
sorte de léger décalage entre la noirceur et l'humour. Bien loin
des polars habituels et pompeux. Si elle ne reste pas en tête et n'a
rien d'exceptionnel, la musique colle parfaitement au film ainsi qu'à ce "drôle" de personnage. Le cinéaste nous offre un travail de luxe et aussi l'occasion à Gyllenhaal (également producteur) d'avoir un rôle à lui seul à l'image de
son talent. Son personnage opportuniste et manipulateur toujours avec
de la bonne humeur, de la bonne volonté et le sourire est absolument
merveilleux et inspiré. L'acteur est franchement glaçant à l'image
du ton de ce film qui oscille en permanence entre le rire et le
frisson. Rien que cela comparé a tout le bien pensant que l'on peut
voir dans tous les films à grosse ou même production indépendante,
Night Call vaut assurément le coup d’œil. Malgré son petit budget
le film est très bien fait et tenu et se retrouve cette année avec
le dernier David Fincher comme une très agréable surprise
particulièrement réjouissante de machiavélisme et d'humour noir.
Hormis Los Angeles la nuit et un
producteur en commun Night Call n'a rien à voir avec le
divertissement très bien filmé Drive. Encore une promotion nulle car
Night Call (Nightcrawler en anglais plus significatif encore une fois) est un
film avec du fond moderne, intéressant et futé. Dan Gilroy est un scénariste qui a du cran et s'avère un cinéaste tout aussi choc. Ce film est une bombe que je
vous invite à découvrir rapidement, et pour une fois que c'est un
film distribué c'est le moment d'en profiter.
Note : 10/ 10
La dévédethèque parfaite :
La valse des pantins de Martin
Scorsese, Le Voyeur de Michael Powell ou Des hommes d'influences de
Barry Levinson.
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