Réalisation : Martin Scorsese
Scénario : Mardik Martin et
Martin Scorsese
Durée : 1 h 50
Interprétation : Harvey Keitel,
Robert De Niro, David Proval...
Genre : Etude Sociologique chez
les gangsters
Synopsis :
Dans le quartier des immigrés italiens
la Mafia a pris ses marques. Johnny Boy, tête brûlée et bagarreur,
a emprunté de l'argent à un parrain, sans intention de le
rembourser. Son ami Charlie, jeune mafioso ambitieux, tente de le
protéger de ses créanciers mais il est de plus en plus
incontrôlable.
Après ses deux premiers films, John
Cassavetes conseille à Martin Scorsese de se pencher sur un projet plus personnel. Le cinéaste reprend alors un projet qu'il a dans les
tiroirs depuis son tout premier film intitulé Mean Streets. Il est
actuellement toujours son film le plus autobiographique et celui où l'on
retrouve toutes les questions, les situations, les engrenages et les
psychologies des prochains films du cinéaste. Le cinéaste a avant tout demandé
à Roger Corman si le projet l’intéressait et de le produire ce film. Il acceptait mais à la condition de mettre des Afro-américains à la place des
italiens, histoire de surfer à la mode du moment. Scorsese refuse et préfère tourner comme il l'entend son film. Même avec un budget ridicule, ce sera le début de la genèse de sa
carrière et un de ses premiers grands films.
Tourné avec une grande économie à
Los Angeles (seules quelques scènes sont véritablement à New York)
Mean Streets s'impose comme un film typiquement dans la veine de ce
cinéma des années soixante dix qui renouvelle ce que l'on voit à
l’écran de film en film. Tourné avec beaucoup de bricolage, le film a un aspect
peut-être un peu vieillit et un peu faible ce qui malheureusement l'empêche d'être
objectivement un très grand Scorsese car on voit qu'il manque de s'envoler comme il le souhaiterait dans son final. Seulement, il dépasse largement le
stade du brouillon et des très bonnes idées car la mise en scène
et les acteurs sont tout le long bonnement excellents. Déjà il y a un bon
scénario et la mise en scène nous donne l'effet d'un
coup de poing toujours cinématographiquement d'actualité. Il rend ce film de gangster atypique entre comédie et
documentaire violent à des lieues des films noirs classiques sur les
écrans et même Le Parrain de Coppola. C'est déjà une version et
une vision moderne et documentaire dans un sujet et un domaine qu'il connaît. Scorsese a toujours eu une approche documentaire dès le début de sa carrière, c'est ancré dans son style. Comme de nombreux cinéastes, il a été monteur sur beaucoup de films (dont Woodstock de
Michael Wadleigh) mais comme il n'était pas dans le syndicat des
monteurs il n'était pas crédité dans les génériques. Il a alors depuis
toujours glissé dans ses fresques et la plupart de ses films une
grande partie documentaire et des reconstitutions et s'en sert dans sa mise en scène. C'est aussi d'ailleurs
la plus grande force du cinéaste que beaucoup ne possède pas. Scorsese
utilise fiction et documentaire et les deux genres se complètent
mutuellement pour rendre une œuvre dense, virtuose et unique. Il donne le
maximum de clés au spectateur pour s’approprier le maximum
d'indices et de connaissances sur le sujet. Le pur style Scorsese est né avec Mean Streets et se développera avec Taxi Driver avant d'être à son paroxysme dans Les Affranchis, Le Temps de l'Innocence, Casino et dernièrement Hugo Cabret.
Devant le film facile est de constater que le cinéaste
maniait déjà avec virtuose le vocabulaire cinématographique et
l'écriture romancée et documentaire. Cependant ce que
l'on retrouve avec originalité et force surtout dans Mean Streets
sont ses énormes contrastes. A l'image des deux personnages
principaux complètement opposés, la violence, l'humour, les
musiques très rock sont en permanence dans un décalage qui donne une seconde vitesse, une double profondeur au film pour le moins géniale. C'est une comédie survoltée de violence au fond très grave et scellé. Le montage est composés de
ralentis et de plans rapprochés d'un magnétisme bien trempé. Nous
sommes plongés dans du pur cinéma Scorsesien avec un savoureux panache d'humour avec des dialogues excellents et de violence qu'elle soit physique et psychologique. A la fois ridicule et effrayant, Mean Streets
est à l'heure actuel toujours très fort dans sa démarche car il montre un film qui
se moque totalement des conventions du cinéma ce qui en fait un produit typiquement modèle de la Nouvelle Vague Hollywoodienne. Le cinéaste n'oublie cependant pas que c'est
destiné au public et rend le film accessible la
comédie et une mise en scène vraiment prenante. Au fond il nous
fait ressentir toutes ses pensées et questionnements personnels à
travers le personnage de Charlie (formidable Harvey Keitel) un
gangster coincé entre le bien et le mal dans un milieu ou les
principes et la religion sont au dessus de tout. Bien sur la fatalité, la tragédie du milieu emporte tout sur son passage. Le contraste est fait avec le personnage
intenable de Johnny Boy interprété par Robert De Niro, qui par moment fait penser à un droog d'Orange mécanique de Stanley Kubrick avec l'intelligence d'un Rocky sous cocaïne. Johnny Boy
est vraiment l'anti Corleone du Parrain qu'ironiquement De Niro interprétera
l'année suivante.
Ce que l'on retient de Mean Streets
c'est surtout la révélation réussie de Martin Scorsese autant par
son fond que sa forme ici pleinement exprimée mais aussi de Robert
De Niro qui va enchaîner les rôles chez le cinéaste pour une
collaboration légendaire mais aussi dans les plus grands films de
l'Histoire du cinéma dans les années à venir (Coppola, Cimino,
Leone). Mean Streets est un bon film mais peut-être plus destiné
aux fans du cinéaste et de De Niro pour être pleinement apprécié.
Si le film ne possède aucun temps morts scénaristique mais il
possède quand même une longueur qui peut-être assez pénible en
raison de l'économie du film qui a tendance à le faire tourner un
peu en rond. Un film culte des années 70 qui annonce la future
carrière du cinéaste ou sera tout plus approfondi en profondeur par
la suite dans Les Affranchis et Casino ou même dans des films comme
Taxi Driver et A tombeau ouvert. Ce film a été salué par la critique à l'époque et aujourd'hui considéré comme un film incontournable dans l'Histoire de la période et du cinéma.
Note : 8,5 / 10
Anecdotes :
Al Pacino était un temps prévu dans le rôle de Johnny Boy. Brian De Palma a fait rencontrer Robert De Niro à Martin Scorsese et s'avérait se connaître et s'être croisés plusieurs fois durant leur enfance. Martin Scorsese joue le rôle d'un gangster dans Mean Streets, il aura l'habitude de faire des caméos et des petits rôles au cinéma par la suite.
Anecdotes :
Al Pacino était un temps prévu dans le rôle de Johnny Boy. Brian De Palma a fait rencontrer Robert De Niro à Martin Scorsese et s'avérait se connaître et s'être croisés plusieurs fois durant leur enfance. Martin Scorsese joue le rôle d'un gangster dans Mean Streets, il aura l'habitude de faire des caméos et des petits rôles au cinéma par la suite.
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