Réalisation et scénario : Andrew
Niccol
Durée : 1 h 40
Interprétation : Ethan Hawke, Bruce
Greenwood, January Jones, Zoë Kravitz...
Genre : Brûlot bouillonnant
Synopsis :
Le commandant Tommy Elgan est un pilote
de chasse reconverti en pilote de drone. Douze heures par jour il
combat les talibans derrière sa télécommande à une base à Las
Vegas. Le reste du temps Tommy reste avec sa femme et ses enfants
qu'il perd de plus en plus en vue. Suites à de nouvelles directives
de plus en plus radicales, Tommy se remet en question et se demande
s'il ne génère pas davantage de terroristes qu'il n'en extermine.
Andrew Niccol revient avec un sujet
brûlant avec son dernier film Good Kill. Si le cinéaste n'obtient
pas le virtuose, l'inventivité et le cynisme de ses deux grands
précédents films que sont Bienvenue à Gattaca et Lord of War, il signe un
pamphlet particulièrement nuancé sur la guerre technologique de nos
jours. Que le film plaise ou pas, il soulève toutes les questions
qu'American Sniper de Clint Eastwood sur le même thème n'abordait
pas. Ethan Hawke brille dans un film maîtrisé et qui porte surtout
à la réflexion.
La première heure du film est d'une
grande efficacité que ce soit dans le scénario et la mise en scène.
Dans l'anti américanisme, l'anti guerre ou la psychologie tendue et ambiguë de ces soldats tout est réalisé d'une impressionnante
montée en ébullition. Le crescendo de la violence des missions est
également de plus en plus insoutenable pour le spectateur. Dommage
que la dernière demie heure soit plus sage dans le fond comme dans
la forme. Je regrette que les intentions du scénario n'aillent pas
plus loin dans les pensées et les actes du personnage de Tommy,
elles paraissent même sectionnées. Cependant elles restent assez
intéressantes dans le thème de la violence et de la vengeance. La
fin, faussement bonne, a le grand mérite de déranger intérieurement
notre vision de la justice, de la Guerre et de sa violence.
Good Kill marque surtout par les
questions universelles et modernes qu'elles bousculent en nous.
Niccol ouvre des pistes et veut avant tout montrer que les américains
sont aussi, voir plus horribles et sanguinaires que leurs ennemis.
Avec leurs moyens, ils se permettent même de tuer en masse pour
bêtement « protéger les Etats-Unis d'Amérique ». C'est
le conflit avec la nouvelle technologie à distance qui agite la
lâcheté et les remords chez l'homme qui est certainement le plus
pertinent, le plus intéressant dans ce film. L'immersion du
spectateur du personnage de Tommy est très réussie. Avec
vulnérabilité, le cinéaste dépeint un homme qui a un self control
douteux et surprenant qui donne une ampleur et une densité
essentielle au film. L'entourage nuance bien les portraits et les
messages même si on retrouve bien entendu les clichés, les
caricatures. Malgré tout le cinéaste joue avec ces derniers et s'en
sert pour bien équilibrer ses idées et démontrer qu'avant tout la
guerre est ce qu'il y a de pire pour tout le monde et pour l'Homme.
Il n'y a aucune solution. A l'image d'Outrages de Brian De Palma, si
nous ne sommes pas dans un grand film de Guerre, Good Kill est un
brûlot efficace et pertinent contre les États-Unis mais surtout la
guerre de manière générale. Dans les deux camps, la mal évolue à
l'image de la technologie, de manière foudroyante et se propage de
manière insondable et sourde sur les victimes encore vivantes. Un
combat sans fin dans une époque où la violence prend une dimension virtuelle de plus en plus grande, au dessus du simple bain de sang et des tensions psychologiques de la Guerre Froide. L'impression que tout devient surtout de plus en plus incontrôlable.
Après le film d'Eastwood qui se
contentait de suivre un texan idiot et borné dans ses actes
républicains, Good Kill fait du bien et largement plus
intelligent. Si la forme et les messages ne sont pas aussi subtils,
tranchés et incisifs que les meilleurs films du cinéaste, il reste
dans Good Kill quand même de la richesse dans ses pistes de
réflexions, ce qui est toujours rare dans les salles de nos jours.
Le cinéaste s'est fait produire par un français, celui de Démineurs de Kathryn Bigelow à l'époque, car les États-Unis ne
voulaient pas le faire. Sans être inoubliable, l'ensemble du film
est d'une facture plutôt honnête et efficace. Good Kill reste aujourd'hui indispensable à voir
dans le genre comme pour le sujet.
Note : 7 / 10
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