Réalisation : Jim Jarmusch
Scénario : Jim Jarmusch
Durée : 2h03
Distribution : Tom Hiddleston,
Tilda Swinton, Mia Wasikowska, John Hurt...
Genre : psychévampire
Synopsis :
Dans les villes romantiques et désolées
que sont Détroit et Tanger, Adam, un musicien underground,
profondément déprimé par la tournure qu'ont prise les activités
humaines, retrouve Eve, son amante, une femme endurante et
énigmatique. Leur histoire d'amour dure depuis plusieurs siècles,
mais leur idylle débauchée est bientôt perturbée par l'arrivée
de la petite soeur d'Eve, aussi extravagante qu'incontrôlable. Ces
deux êtres en marge, sages mais fragiles, peuvent-ils continuer à
survivre dans un monde moderne qui s'effondre autour d'eux ?
Only lovers left alive
était le film à voir en ce début d'année selon moi. En effet, fan
de Jarmusch depuis que j'ai vu Broken Flowers dans mon adolescence,
découvert grâce au groupe The Greenhornes ayant participé à la
BO, je me languissais de ce nouveau film, dont le thème me semblait
bien surprenant, et je ne regrette pas.
Dès l'introduction
donnant le tournis, nous sommes plongés dans une ambiance
psychédélique underground dans laquelle nous perdons tout repères
temporels. En effet, si certains trouveront ce film lent et long,
j'ai pour ma part été comme engloutie par ce film, grâce notamment
à une bande originale parfaite et impeccablement en rythme avec la
démarche de Tilda Swinton.
Je ne cache pas qu'il est
possible que je manque quelque peu d'objectivité sur ce film : il
représente tout ce que j'aime : de nombreux clins d'œil à une
culture underground que j'adore, en commençant par la ville de
Détroit, berceau du rock, le thème de la musique en général, le
rétro, Jack White, l'amour, et une sorte d' « inquiétante
étrangeté » comme dirait Freud, faisant écho à nos
angoisses.
Le casting, quant à lui,
est sans faute. La présence de Tilda Swinton est bluffante,
envoutante et tout à fait étrange (dans le bon sens du terme). Tom
Hiddleston est magnifique en vampire rocker suicidaire, quant à Mia
Wasikowska, elle joue parfaitement la petite peste fouteuse de merde.
John Hurt dans le rôle du dramaturge Marlowe est bon aussi, bien
qu'il ne crève pas autant l'écran que les trois acteurs principaux.
Le couple principal
fusionne tellement bien que nous avons le sentiment à la fin du film
de n'avoir à faire plus qu'à un seul et unique personnage, double
et puissant, et nous comprenons ainsi toute la justesse du titre.
Au niveau de la
photographie (puisque c'est un des aspects qui me fait autant aimer
Jarmusch), je pense que c'est sa plus belle depuis Down by law. En
effet, les images sont soignées, symétriques, les couleurs sont
remarquables malgré l'omniprésence de la nuit. C'est sombre et
rayonnant à la fois, un peu comme des étoiles dans un ciel noir
(qui d'ailleurs font l'objet du premier plan du film).
Un peu aussi comme les
personnages : Adam est brun, vit dans une ville bitumée, dans une
maison où tout est noir. De plus, il vit dans un passé et la vie
tend à le dégouter. Ève quant à elle est peroxydée, toute de
blanc vêtue, dans un Tanger chaud et lumineux, et pleine de vie.
Cette dualité contrastante aurait pu compromettre le pari de
Jarmusch à rendre ce couple si fusionnel, et c'est pourtant ce qui
fonctionne le mieux.
Du côté du scénario,
c'est comme souvent chez Jarmusch, très simple et épuré.
Cependant, je trouve que la place à l'imagination est plus présente
ici qu'elle ne l'était dans ses films précédents, même si
Jarmusch semble y avoir toujours apporter une certaine importance.
La musique apporte un
quelque chose de très mystérieux et énigmatique. Certains détails
également nous laissent réfléchir à différentes significations,
comme par exemple ce rite bizarre des gants (??), ou le fait
d'appeler les personnages principaux Adam et Ève.
La beauté des images,
des personnages, de la musique, prime sur le scénario. On préférera
ici se laisser contempler, se laisser flotter dans une atmosphère
tout en apesanteur plutôt que de suivre moultes intrigues, ce n'est
pas l'intérêt.
Je n'oublie pas les
quelques touches d'humour très bien écrites qui parsèment ce film
et nous permettent de souffler un peu.
Only lovers left alive
est donc pour moi une œuvre d'art, une véritable pépite, au point
que je n'ai pu m'empêcher d'en faire la critique élogieuse,
pourtant habituellement seulement correctrice sur ce blog.
Note : 10/10